Guide en images des églises de Venise
San Pantalon (Dorsoduro)
Histoire
Pantalon (Pantaléon) est un médecin né à la fin du 3ème siècle, exerçant à Nicomédie en Bythinie (nord de la Turquie, à l'est de Byzance-Istanbul). Chrétien agissant, il soignait gratuitement tout le monde pour l'amour du Christ (et faisait quelques miracles, et aurait même soigné l'empereur Galère). Dénoncé sous le règne de Maximilien, il est martyrisé pendant la persécution des Chrétiens en 305 (environ) et décapité sous Dioclétien (selon certaines sources dont le Michelin).
Sa renommée à Venise est grande, il apparaît à côté de Théodore (Teodoro, l'ancien Patron de la ville) sur la mosaïque du 12ème siècle de la chapelle Saint Pierre, à côté du chœur, dans la basilique Saint Marc, qui conserve aussi les reliques de son bras et de ses mains. C'est le patron des médecins mais aussi des nourrices (car du lait aurait jailli de son cou lors de sa décollation). Comme d'habitude, il faut être prudent sur les dates et les noms historiques, surtout à Venise.
L'église primitive, probablement édifiée vers 1009 sous le dogat d'Ottone Orseolo dans ce quartier où se trouvaient de très nombreux commerçants travaillant avec Byzance. D’ailleurs le rio qui passe devant est très large par rapport à la moyenne, ce qui signifie que des bateaux de bon tonnage pouvaient débarquer ici. En sortant partir à gauche et trouver tout près la plaque de marbre sur le campo Sant'Angaran. Le bas-relief représente un empereur byzantin en pied, couronné avec le sceptre et le globe. Les maisons alentour conservent des patères d'architecture byzantine.
L’église est rénovée en 1222 grâce au curé Semitecolo, la façade donnant de l'autre côté (90 degrés ouest) sur le rio de Mosca (voir le plan de Jacopo de Barbari de 1500). Elle est consacrée en 1305 par l’évêque de Castello Ramberto Polo. C’était une église à 3 nefs, avec une abside polygonale.
Extérieur
Mais en 1668, l'église est entièrement reconstruite, commandée par l'abbé Vinanti (une rue porte son nom pas loin) par l'architecte Francesco Comin de Trévise, avec la façade tournée à 90 degrés, donnant sur le campo et le grand rio. Elle est achevée en 1686. Mais la façade ne fut pas terminée, et d'ailleurs jamais terminée, on y voit le mur de briques et les trous de la construction attendant encore les plaques de marbre, mais ce n'est pas la seule ici à Venise.
Le haut campanile de 47 mètres, carré, est refait en 1710-1720 (Tommaso Scalfarotto) et se termine par un dôme allongé et arrondi au centre du balcon du beffroi. Le premier date des années 1100, il fut restauré en 1225, mais un tremblement de terre le mit par terre en 1511.
Remarquer le luxe des ouvertures du beffroi qui sont des fenêtres serliennes (courantes pour les beaux palais du Grand Canal, mais rares pour un campanile).
Intérieur
Une seule grande nef, avec des chapelles latérales profondes et communicantes.
A gauche, la chapelle du Saint Clou fut rajoutée en 1722, et contient la relique (clou des pieds du Christ crucifié) donnée par l’abbesse du couvent des Clarisses sur l’île de Santa Chiara.
En 1744 fut ajoutée la chapelle (oratoire) qui reproduit la maison de Lorette, ornée de fre sques (restes, mais bien conservé), de Pietro Longhi.
Les chapelles latérales ont été financées et entretenues par des Scuole et Confréries, dont celle du Saint Sacrement (1513), l’Ecole des Laneri (San Bernardino da Siena, 1514, voir plus bas), et la Visitation (1577), ou encore l’Annonciation (1583).
Sur la contre-façade, l’inévitable orgue des frères Callido, avec des dorures de Pietro Chieza.
Le clou de l’église est bien entendu le plafond, de 900 m2, constitué entre 1680 et 1704, et fait de 40 toiles rectangulaires, collées ensembles. Giovanni Antonio Fiumani y a passé 24 ans de sa vie. Il en est d’ailleurs mort en tombant de son échafaudage. Le trompe-l’œil est ahurissant de vérité, et prolonge les 4 murs de la nef par un impressionnant dédale de colonnes, piédestaux et chapiteaux, avec un ciel très encombré d’anges et de démons se courant après. Bien entendu Saint Pantaléon est bien présent partout à travers divers épisodes de sa vie de Saint.
La chapelle du Saint Clou et son histoire
En 1262, un pèlerin apporta aux Sœurs de Santa Chiara (derrière Piazzale Roma) un coffret scellé et un anneau, leur disant de ne donner le coffret qu'à la personne possédant le même anneau qui viendrait plus tard. Des décennies passèrent et personne ne se présentant, le coffret en bois, bien fermé, fut ouvert : il en contenait un autre en fer, qui lui aussi en contenait un troisième en cuivre. Dedans, un tissu contenant un clou et un parchemin expliquant qu'il avait transpercé les pieds de Jésus sur la Croix. On affirma que le pèlerin était Louis IX revenant de Terre Sainte (car les trois pièces d'or qui se trouvaient dans les coffrets étaient à son effigie ). Le Saint Clou resta dans le monastère de Santa Chiara jusqu'en 1830 il passa ensuite dans la chapelle de San Pantalon. (Source : le remarquable livre VENEZIAENIGMA de Alberto Toso Fei, Zeds Elzeviro, ISBN 978 888 752 8213, dont la traduction, même constellée d'erreurs, ne fait pas oublier la qualité et l'expertise de l'auteur).
La Scuola dei Laneri
La Scuola de San Bernardino dei Laneri abritait l’école de dévotion et de charité des métiers du tissu de Venise. Née en 1272, elle se réunissait près de Rialto, avant de s'installer à la Salizzada San Pantalon au 131 à Dorsoduro dès la fin du 16ème siècle. Détruite par un incendie en 1620, elle sera reconstruite en 1633 selon un dessin de Longhena. Le patron de la Scuola était Bernardin de Sienne, qui avait son autel dans l'église San Pantalon dès 1541. La Scuola disposait (à ses frais bien entendu) d'une chapelle dédiée à Saint Bernardin de Sienne (San Bernardino).
Pour en garantir le traitement, chaque tissu arrivait tamponné avec le sceau de San Marco pour certifier la provenance et la qualité du produit. L'art des Laneri comportait une multitude de branches et de métiers différents, touchant au traitement des tissus : fileurs, fouleurs, batteurs, peigneurs, cardeurs, préparateurs, etc. En 1786, le Sénat décide d'abolir les arts des Laneri, leurs chartes sont supprimées.
Adresse : Campo San Pantalon, Dorsoduro 3713
Horaires : Lun-Sam 10:00-12:00 13:00-15:00 (officiellement), entrée libre
Rev4 11/11/2023Il ne reste rien de la première église de 1109 ni de sa restauration en 1222. L’église actuelle date de 1686, elle a été tournée sur le rio et comporte une seule nef.
Sa façade ne fut jamais terminée. Assez haute, avec de solides contreforts extérieurs, elle est encastrée dans les habitations.
Campanile de 1710 avec, notablement, des serliennes dans le beffroi (fenêtre triple créée par Serlio, la centrale étant plus haute, reprise par Palladio pour ses palais classiques.
A gauche en regardant la façade de l’autre côté du rio, cette magnifique maison, avec une altane et une porte d’eau, est fermée, en ruines, depuis des années. Elle vaut des millions …
Ici le quai, large, pour accueillir de gros bateaux de commerce. Avant, prendre à droite de l’église derrière ce palais.
Le campo Angaran (tout petit) et des vestiges très vieux des activités avec l’Orient. Ici la frise avec les têtes des grands commerçants du coin.
Sur le mur, des coquilles Saint Jacques du 17ème siècle, et un haut-relief du 13ème siècle typiquement byzantin (et probablement rapporté de là-bas).
Il représente un empereur byzantin (Isacco II Angelo ou son frère Alessio ?), avec ses attributs : la toge impériale, la croix sur le globe, et le sceptre. Magnifique souvenir des temps anciens, malgré l’usure du temps.
Quand on entre, ce n’est pas le chœur (ici) seul l’on voit en premier, malgré sa décoration extraordinaire.
(Crédits Zairon WC et les 2 suivantes)
Derrière le chœur, des toiles aussi, mais on n’y fait pas attention, ou très peu.
Ce n’est pas non plus la magnifique contre-façade, avec le très bel orgue.
Non. Ce qui frappe en entrant, c'est le plafond de Giovanni Antonio Fumiani : 900 m2 ! (précision : le plafond est plat …).
Il raconte la vie et le martyre de Saint Pantalon (martyre et gloire de San Pantaleon).
40 toiles réunies et collées que Fiumani a mis 24 ans de 1680 à 1704. . Fumiani est mort ici en 1710 (en tombant d'un échafaudage ?), il a sa tombe dans l'église.
En regardant bien on peut identifier les frontières des collages.
En bas au milieu, la sentence de Dioclétien, en haut à gauche, Pantaleon entouré des bourreaux (il leur pardonne).
Dans le ciel, un ange à l'épée précipite les démons aux ailes diaboliques (à droite de Dioclétien l’Empereur, qui le martyrisa). Chaque côté montre un épisode du martyre et de la gloire de Pantaleon.
Le reste est une furieuse bataille aérienne. Tout cela en 3D, bluffant si on se place quelques mètres au-delà de la porte d’entrée.
En haut à droite, le crochet des bourreaux pour les martyrs, au centre en bas la corde.
En face au-dessus du choeur, Pantaleon en gloire.
Sur l'arcade au-dessus du chœur, l'Espérance à droite, la Foi à gauche, au milieu l'ange portant la palme du martyre et le lys .
Fumiani est mort ici en tombant d'un échafaudage, il a sa tombe dans l'église. Il a aussi œuvré ailleurs (San Rocco juste à côté, un plafond et 2 tableaux, et un Saint Romuald aux Frari
(visite par la gauche)
Le flanc gauche, avec 3 chapelles richement décorées. Au-dessus des arcs, des fresques représentant les apôtres (Thomas et Jacques le Mineur (Alessandro Tonioli, 1800), Jacques le Majeur et Jean l'Evangéliste (Vincenzo Guarana, 1780), Pierre et André (Pietro Longhi, 1780).
A gauche les fonds baptismaux, avec la Décapitation de Jean Baptiste, et le Baptême du Christ. Au-dessus, Jésus guérissant un possédé (Nicolo Bambini, fin 17ème). Première chapelle, dite de l'Immaculée Conception.
La Vierge est accompagnée de Saint Antoine de Padoue, devant elle, l'Archange Michel. Noter le croissant de lune sous ses pieds.
A gauche, tableau inconnu.
A droite, tableau inconnu.
Deuxième chapelle, dite "dell'Addolorata". L'autel est très baroque.
Sur l'autel, La Déposition du Christ (G.A. Fumiani, 17ème).
A gauche, dans cet ovale de stucs magnifiques, La Préparation à la Crucifixion (G.A. Fumiani).
A droite, toujours dans un cadre ovale de stucs, Le Baiser de Judas.
Sur la voûte richement décorée de stucs comme toutes les autres, Le Père Eternel en Gloire (Véronèse, fin 16ème).
Troisième chapelle, dite de la Très Saint Trinité. Noter la chaire dorée richement décorée (conception de P. Chieza, qui a fait les dorures de l'église).
Dans la voûte, 3 œuvres attribuées à Fiumani concernant Jean Baptiste (Décollation, à côté d'Hérode, avec un ange).
A l'autel, La Trinité, Jean Baptiste et Pierre (G. Lazzarini, vers 1725).
A gauche, le Baptême du Christ (G. Lazzarini).
A droite, Jean Baptiste prêchant (G. Lazzarini). La porte dans l'embrasure à la sortie de la chapelle mène à la chapelle du Saint Clou, construite vers 1722.
Chapelle du Saint Clou. Sur le mur droit, le Couronnement de la Vierge (Antonio Vivarini et Giovanni d'Allemagna, 1444), avec une quantité d'angelots et de dignitaires religieux.
Dans la niche, une Vierge à l'Enfant d'un sculpteur français anonyme. Dans le bas du tableau, les 4 Evangélistes et leurs symboles du Tétramorphe. A gauche du tableau, Jean et l'aigle, Marc et le lion.
A droite, Luc et le taureau, Matthieu et l'ange.
Les angelots sous le baldaquin portent les instruments de la Passion du Christ (échelle, croix, éponge, marteau, lance, clous, couronne d'épines, etc.).
Dans le haut, le couronnement. Un vrai chef d'œuvre aux fortes influences byzantines dans la structure et le contenu.
Aux murs opposés, toujours de Vivarini, cette magnifique Madone au coquelicot.
A côté, une Nativité (mais pas de crèche pour les abriter) et plus haut l'Annonciation (Paolo Veneziano, 1333). Veneziano est le premier véritable créateur de la peinture vénitienne au début du 14ème siècle.
L'autel gothique de la chapelle (1427-1458) richement décorée de statuettes. Dans le tabernacle il conservait, en 1836, un coffret contenant un des clous de la Croix (1590), donné aux Clarisses de Santa Chiara par Saint Louis. Mais le clou a disparu.
Christ déposé au Sépulcre (Mario Cedrini, fin 15ème).
l'oratoire de la Madone de Lorette, ajouté en 1744.
La sculpture, en bois, date du 17ème siècle.
On a retrouvé des fresques (en partie), exécutées par Pietro Longhi (1744-1745).
Le maître-autel, isolé à la romaine, est constitué de marbres polychromes délicats, avec ses colonnettes, bronzes, petits chapiteaux (1668-1671, G. Sardi)
Il est entouré de 4 statues en marbre des Saints Pierre, Paul, Giuliana, et Jean l'Evangéliste (Tommaso Rues, 1668).
A gauche, un grand tableau, la Multiplication des pains et des poissons (Antonio Molinari, 1693).
A droite, la Piscine Probatique (Louis Chéron, ca 1660).
Derrière l'autel, le Christ dans la maison des deux Maries (G.A. Fiumani, fin 17ème)
Giuliana et Jean l'Evangéliste.
Une petite porte à gauche mène à la sacristie, petite pièce sombre.
Mais on peut y admirer cette Déposition d'A Varrotari (Il Padovanino, début 18ème).
Côté droit de la nef avec 3 chapelles richement décorées. Elles étaient gérées par les Scuole (Confréries), associations laïques, associées à des métiers ou des maladies, pour aider leurs malades, leurs pauvres, les veuves de pêcheurs, etc. Ces Confréries disposaient d'énormes moyens, et attiraient d'autant plus les pèlerins et les dons.
Ces chapelles rapportaient gros à l'église aussi ! A droite du chœur, la chapelle des Laneri (1514). La Scuola dei Laneri rassemblait tous les métiers du tissu. Son siège était dans la Salizzada Pantalon tout près (voir l’introduction).
Elle est dédiée à San Bernardino da Siena (1380-1444), qui soigne les pestiférés dans son hôpital, s'en remet mal, et par la suite il est un temps accusé d'hérésie. Grand prédicateur du 15ème siècle, il restaure l'ordre franciscain, et produit un ouvrage important sur l'économie.
Comme le tableau de gauche, le tableau de droite représente San Bernardino (Bernardin en français) créant un hôpital à Sienne (G.B. Lambranzi, 1701).
La chapelle San Pantalon (Pantaleon) est l'une des plus impressionnantes de l'église.
Sur l'autel, Pantaleon guérissant un petit enfant (Paolo Caliari dit Véronèse, 1587).
Mur de gauche, il guérit un paralytique (Jacopo Negretti dit Palma le Jeune, 1599).
Mur de droite, La Décapitation de Pantaleon (Palma le Jeune, 1599).
La coupole magnifique, avec Pantaleon en gloire tout en haut, visitant Giuliana (lunette droite, GA Fiumani 1710), guérissant les infirmes (lunette gauche, Gregorio Lazzarini, 1701).
La coupole magnifique, avec Pantaleon en gloire tout en haut, visitant Giuliana (lunette droite, GA Fiumani 1710), guérissant les infirmes (lunette gauche, Gregorio Lazzarini, 1701).
Mais si on regarde Anne de près, elle est plutôt très laide, même si elle était âgée quand elle a conçu Marie.
Sur la contre-façade, un orgue des frères Callido (1803), décoré magnifiquement avec de belles colonnes, dorées comme la balustrade par Pietro Chieza.