Guide en images des églises de Venise
Angelo Raffaele ou Anzolo Rafael (Dorsoduro)
Histoire
L'ancienne église est d'une origine incertaine : l'une l'attribue à Adriana la femme du gouverneur de Padoue Genuso Rutenio, réfugiée à Venise pendant que son mari guerroyait contre Attila, et ayant fait le vœu d'ériger un oratoire ici (416) s'il revenait vivant. L'autre l'attribue à l'évêque Magno d'Oderzo, mort en 670, qui en songe reçut l'ordre de bâtir des églises à Venise au 7ème siècle.
La suite est mieux connue, en 899 avec un incendie, puis deux autres en 1106 et 1149.
Mais suite à l'écroulement de la façade (et la perte de l'orgue) au début du 17ème siècle, l'église est refaite sur les fondations de l'ancienne et reprend sa structure de croix grecque.
Elle est commencée en 1618 par Francesco Contin et terminée en 1639. La consécration à l'archange Raphaël date de mai 1740.
Extérieur
L’église porte différents noms selon le dialecte ou les auteurs : Sant’Angelo Raffaele, Angelo Raffaele, Anzolo Rafael ou Anzolo Raffaele (vénitien).
La façade de 1735 donne sur le rio San Raffaele, et porte au-dessus du portail une statue de Raphaël et Tobie avec le poisson et le chien.
L’église est en croix grecque, avec une entrée sur le côté ouest. L'entrée principale avec son grand porche donne directement quasiment sur le rio et n'est pratiquement jamais utilisée ; c'est moins pire que San Cassiano à San Polo mais ce ne sont pas les seules églises à avoir quasiment oublié leur vrai portail d'entrée, (voir San Canzian aussi).
De l'extérieur l'église est plutôt massive et "fermée" mais on notera ses deux campaniles romans aux dômes couverts de plomb. Sa belle couleur blanche est due à une bonne restauration au début des années 2000.
Intérieur
Dans l'église, on notera des œuvres de grands noms de la peinture et de la sculpture (Pitati, Palma le Jeune, Fontebasso pour le plafond, Giovanni Antonio Guardi, Gian Maria Morlaiter). Noter aussi la balustrade de l'orgue sur la contre-façade, et ses quatre panneaux décrivant l'histoire de Gabriel et Tobie, peints en 1753 par Giovanni Antonio Guardi frère du plus célèbre Francesco.
L'orgue est reconstruit par les fameux frères Callido puis modifié, et enfin restauré en 1961 par la société Tamburini.
Le plafond, haut et impressionnant et nettoyé récemment, est de Francesco Fontebasso, qui dans un magnifique trompe-l'œil, fait écrouler le cadre de la fresque par le démon qui chute mortellement (?) touché. Francesco Fontebasso, vénitien, mort en 1769, est un des plus grands peintres de Venise au 18ème siècle, il finira d'ailleurs Président de l'Accademia. Il a œuvré à Zanipolo (Allégorie de la Foi), San Francesco della Vigna (chapelle Giustinian dei Vescovi), San Salvador, San Martino à Burano, et dans les palais comme le Minotto, Contarini ou Bernardi.
La dernière restauration date des années 2000.
Sur Saint Magne
L'évêque Magno (Saint Magne) est un personnage primordial dans la légende du développement de Venise au 7ème siècle. Né à la fin du 6ème siècle, d'abord ermite, il devient ensuite évêque d'Oderzo (Opitergium) et contribue à éradiquer l'arianisme dans les îles de la lagune (Venise n'existait pas, ni un gouvernement vénitien). Lorsque les Lombards s'emparent de la ville, il émigre sur une île qui deviendra Eraclée (Héraclée) où il fait construire une cathédrale. Dans la foulée, on lui prête des visions divines, et des songes imagés où il reçut l'ordre de bâtir 6 églises (d'autres disent 7 comme Sanudo, ou même 8 selon Dolfin) dans les îles réaltines au 7ème siècle. Plus précisément :
San Pietro di Castello commandée par Saint Pierre lui-même à l'endroit où il verrait des bœufs et des moutons,
Anzolo Rafaele (Angelo Raffaele, San Raphaele Arcangelo, il y a au moins 5 noms utilisés) là où, lui indiqua l'Archange en songe, il verrait un rassemblement d'oiseaux,
Santa Maria Formosa là où, lui dit la Vierge qui lui apparut sous la forme d'une femme belle plantureuse, il verrait un nuage blanc descendre et rester sur le sol.
San Giovanni in Bragora, (Saint Jean Baptiste), là où, lui ordonna le Saint, il verrait arriver une compagnie de grues.
Santi Apostoli, car les douze apôtres lui dirent de regarder un lieu où se seraient posées douze cigognes.
San Zaccaria, pour le père de Saint Jean Baptiste
San Salvador, ou le Christ lui demanda de rechercher un nuage rouge descendant sur ce lieu où bâtir une église à lui dédiée (le Sauveur).
Santa Giustina (près de San Francesco della Vigna), que le Saint martyr padouan lui demanda de construire là où une vigne porterait des fruits mûrs.
Saint Magne est mort en 670 et fait l’objet de nombreuses œuvres de peintres et sculpteurs vénitiens.
Les sept douleurs de Marie
Dans la sacristie, Lattanzio Querena à peint un retable intitulé "Notre Dame des sept douleurs". Mais quelles sont donc ces sept douleurs ? Les voici, résumées :
La prophétie de Siméon qui avait prédit ce que Jésus allait endurer et sa Passion plus tard.
La fuite en Egypte (aussi une prophétie de Siméon)
La perte de Jésus dans le Temple pendant trois jours.
La rencontre de Jésus et sa croix allant vers la mort.
La mort de Jésus.
Jésus percé d'une lance et descendu de la Croix.
La sépulture de Jésus.
Les instruments de la Passion
Les médaillons et le plafond de la sacristie contiennent des fresques de Fontebasso avec les "instruments" de la Passion. Je ne les connaissais pas plus que la plupart d'entre vous et du coup j'ai décidé de vous les livrer ici :
les trente pièces d'argent de Judas,
la main du grand-prêtre qui gifla le Christ
le roseau et le fouet (le flagellum ou le flagrum) de la Flagellation du Christ,
le coq de saint Pierre,
le glaive de saint Pierre,
la lanterne des gardes, les torches,
la coupe de boisson amère, et le calice de l'agonie,
la couronne d'épines et le sceptre
marteaux, clous, tenailles,
les croix au Golgotha
la lance du centurion,
l'éponge imbibée de vinaigre au bout d'une branche d'hysope,
la colonne,
la tunique sans couture et le vêtement rouge,
les échelles pour dépendre les corps des crucifiés,
les dés pour tirer au sort les vêtements,
Note : très bon restaurant sur le campo (arrière de l'église) : Pane e Vino San Daniele, Campo dell’Angelo Raffaele - Dorsoduro 1722, 30123 Venezia, à l'ombre, cuisine extra, vins aussi.
Références
La mort lente de Torcello histoire d'une cité disparue, Elisabeth Crouzet- Pavan, ISBN 2213595488
http://www.slowtrav.com/blog/annienc/2009/05/san_magno_and_his_eight_church_1.html)
http://imagessaintes.canalblog.com/archives/2009/04/16/13408171.html
Adresse : Campo Sant'Angelo Raffaele, Dorsoduro
Horaires : Lun-Sam 10 :00-17:00 (sous réserves)
Rev4 20231030
Ce serait une église voulue par Saint Magne après ses visions, au 7ème siècle. L’église brûle 3 fois (899, 1106, 1149).
Un des clochers au bulbe en plomb.
Façade principale donnant sur le rio San Raffaele.
Tobie, le poisson, l'archange Raphaël et le chien, au-dessus du portail (attribué à Sebastiano Mariani).
Vue de l'arrière, on n'est pas séduit par l'architecture mais le campo est très beau avec son puits, San Sebastiano pas très loin, et le restaurant Pane et Vino San Daniele est là pour les gourmands.
En 1750 elle s’écroule, on perd l’orgue, et on la reconstruit comme avant, en croix grecque.
Ne pas manquer le restaurant Pane Vino et San Daniele (renommé à son ancien nom Trattoria Anzolo Raffaele depuis quelques années), pas cher, connu des vrais Vénitiens, sur le campo au calme et sous les parasols.
Près de la porte d'entrée latérale côté ouest, la porte centrale étant inutilisée), niche avec les mêmes, Raphaël tenant Tobie par la main.
Vue sur l'orgue (contre-façade) sur la gauche en entrant (la porte d'entrée est en-dessous).
(visite par la gauche en entrant)
Saint Alvise et d'autres Saints (Francesco Fontebasso, 1737) .
La Cène, Bonifazio da Verona (Pitati) à gauche de l'orgue (placé très haut).
Difficile à voir mais assez remarquable. Plus à droite, l'ancien placé sur la contre-façade s'étant écroulé, un nouvel orgue est construit par les frères Antonio et Agostino Callido en 1821 (rénové en 1861 et 1961).
Sur la tribune, des tableaux de scènes du livre de Tobie, réalisés par Gianantonio Guardi (le frère du célèbre peintre Francesco) vers 1750. Voici l'histoire.
Le vieux Tobit (aveugle, déporté en Assyrie en -721) confie son fils Tobie à un jeune homme volontaire pour le guider (c'est l'Archange Raphaël) afin …
… d'aller chercher la médecine qui le guérira. Au bord du Tigre, Tobie est mordu par un gros poisson, l'ange le délivre et lui dit de garder les entrailles.
Arrivés à Ecbatana, l'Ange mène Tobie chez Raguel, le père de la jeune fille Sara.
Sara est alors promise à Tobie, bien que le Démon ait empêché Sara 7 fois de se marier.
Sara est alors promise à Tobie, bien que le Démon ait empêché Sara 7 fois de se marier.
Une fois mariés, ils passent la nuit en prières.
Le foie et les entrailles du poisson qui brûlent dans le feu délivrent Sara du Diable.
Tobie rentré chez lui guérit la cécité de son père avec le fiel du poisson, sa mère Anna est près de lui en robe écarlate. Enfin le jeune guide (Raphaël signifie "Dieu guérit") …
…. refuse la récompense et se fait reconnaître comme l'envoyé de Dieu pour protéger cette famille, alors le vieux Tobit remercie Dieu.
Magnifique plafond de Francesco Fontebasso (élève de Sebastiano Ricci et influencé par Giambattista Tiepolo).
C'est très haut et la fresque est dans un cadre pas très grand au centre.
Saint Michel, au centre, entouré de chérubins, le glaive en l'air pourchasse Lucifer, et le rendu est assez impressionnant parce que …
… Lucifer chute affolé, et du_ coup il "brise" le cadre en bois richement orné et doré.
De près les angelots sont vraiment de la famille de Tiepolo, etc'est toujours gracieux et pastellisé … Dans la partie blanche, Dieu le Père, Jésus-Christ, et la Colombe du Saint Esprit sont bien là (mais difficiles à voir).
Côté gauche de la contre-façade : Saint Antoine qui prêche depuis un noyer (??), (retable attribué à Bonifazio Pitati).
Nef gauche, un autel immense en marbre dédié à Raphaël bien sûr. Les colonnes sont en marbre rouge d'Afrique. Au centre, statue en bois avec l'Archange et Tobie.
A gauche Saint Pierre et à droite Saint Paul. Sur l'autel la chasse des reliques de Saint Niceta (le co-patron de l'église, comme à San Nicolo dei Mendicoli tout à côté !).
A droite de l'autel, (peu visible) tableau (Hélène retrouve la Vraie Croix, JB Zelotti 1568).
Chapelle absidiale gauche : Autel avec statue de Saint Antoine Abbé, les colonnes sont en marbre grec et le tabernacle en marbre à stalactites.
Vue de la nef centrale avec la magnifique chaire en bois sculpté et doré (datée de 1687, probablement …
… une reconstruction d'une ancienne chaire du 14ème siècle). Sur la gauche, la Visitation, ici le Christ et la femme adultère.
La Disputation (aux coins, les Saints Docteurs de l'Eglise Pierre, Grégoire, Ambroise, Augustin et Jérôme).
Le chœur, de 1772, avec son autel en marbre polychrome, son tabernacle en forme de temple aux colonnes vertes.
Au-dessus un dais en bois et une fresque sur la voûte (c'est haut et on ne voit pas bien).
une Gloire d'Anges et de Chérubins de Michelangelo Morlaiter.
Au plafond, le Père éternel avec les anges (Nicolo Baldissini).
A gauche du chœur, le buste de Saint Jean Baptiste (GianMaria Morlaiter).
Sur le mur de gauche, le Christ devant le centurion, Alvise dal Friso (1587).
Derrière l'autel, Raphaël et Tobie, (Michelangelo Morlaiter 1772).
A droite de l'autel, le buste de Saint Jacques (GianMaria Morlaiter).
Sur le mur droit, le Châtiment des serpents (Antonio Vassilachi, dit l'Aliense, 1588).
Dans la nef droite, (pas optimal à voir), la chapelle de l'Assomption. La Vierge ressemble assez bien à celle que le Titien a peint à l'autel des Frari à San Polo (les mains, le regard).
Belle décoration baroque et un retable que l'on attribue à Andrea Michieli (Vicentino).
Sur le mur gauche de la chapelle, Saint François reçoit les stigmates (Palma le Jeune). Ce tableau à gauche ne reçoit pratiquement jamais la lumière et personne n'y fait attention, pourtant il est touchant et bien baroque.
Dans la niche, statue en bois de Saint Antoine de Padoue. Sur l'autel, une arche en bois pour le Saint Sacrement.
Le baptistère, avec ses fonds baptismaux en bronze, vaut aussi la visite pour les remarquables fresques de Fontebasso (récemment restaurées).
Le plafond est entièrement décoré de fresques.
Elle abrite une belle collection de vêtements liturgiques du 15ème au 19ème siècle.
Les fonds baptismaux.
Les médaillons dorés racontent la Passion du Christ.
Au plafond, les instruments de la Passion (arma Christi). (voir l'introduction)
Foultitude d'anges et de chérubins (Fontebasso fut l'élève de Ricci et de Tiepolo, les angelots ont aussi ici un air de famille).
Retable de Lattanzio Querena, Notre Dame des Sept Douleurs (fin 18ème). (voir l'intro pour ces sept douleurs)
Ou Santa Maria Dolorosa (voir l'introduction).
… une Vierge de Lourdes bien cachée.
La sacristie, simple mais aux boiseries intéressantes, et avec au fond …
On peut (difficilement voir la façade depuis l’autre rive du Rio Barbarigo.
Si on traverse le rio par le pont à la sortie, on trouve cette magnifique croix illuminée de soleil. Pas loin, un jardin derrière le mur de briques (parfois ouvert …).
Et ce bas-relief très intéressant de la mise au tombeau par Joseph d'Arimathie, devant Marie et Marie-Madeleine.