Guide en images des églises de Venise

San Martino Vescovo (Castello)

Histoire

La première église est fondée selon certains à la fin du 6ème siècle, ou au 7ème siècle, selon d'autres au 8ème siècle, à la dévotion de Saint Martin de Tours (voir plus bas), donc par des habitants ici venus de Lombardie. Vers 930 elle est reconstruite en style vénéto-byzantin par les familles Vallaresso et Salonigo, et consacrée en 932. Par la suite, un conflit éclate entre ecclésiastiques qui rattachent la paroisse au patriarcat de Grado (elle dépendait avant de San Pietro di Castello  donc de Venise), conflit qui se termine en 1451 avec la suppression de Grado comme patriarcat, Venise devenant le seul patron de la région.

L'église est reconstruite en style Renaissance, de 1546 à 1610 (très long mais les Arsenalotti qui peuplaient majoritairement le coin n'étaient pas riches …) sur un plan de Sansovino qui, comme  c'est le cas d'un grand nombre de reconstructions d'églises à Venise, change son orientation vers le canal de l'arsenal. Sansovino a aussi créé un plan carré classique en croix grecque avec 8 chapelles en face à face qui la font paraître plus grande. Elle a été restaurée en 1973. (mais sa façade date de 1897).

Extérieur

Large façade en briques  à la Sansovino donnant sur le campo et le rio de l'arsenal juste en face. Elle fut refaite à la fin du 19ème par Domenico Rupelo. Sur le côté on ne voit pas grand-chose car le flanc droit de l'église est très proche du rio Ca de Dio, avec le campanile derrière, assez haut (22m) mais peu visible sauf des ponts enjambant les rii assez intéressante architecturalement à 2 niveaux avec des aiguilles aux extrémités. Deux oculus éclairant les chapelles derrière, de chaque côté du portail imposant en pierre d'Istrie. A gauche se trouve une bouche de vérité avec une tête de lion (il y en a beaucoup à Venise). Mais attention, les inspecteurs vérifiaient soigneusement ces dénonciations, et le dénonciateur était très sévèrement puni si ce n'était pas vrai.

A droite de la façade se trouve l'oratoire de la Scuola de San Martino et son portail en pierre d'Istrie, au-dessus duquel on peut voir un bas-relief du 16ème siècle représentant Saint Martin à cheval abandonnant son manteau aux pauvres, comme le veut la tradition.

Intérieur

Les huit chapelles placées aux 4 coins façonnent l'aspect en croix grecque de l'église et forment une vaste zone carrée qui rend presque indissociables la nef et le transept. 

On peut y voir entre autres le monument funéraire du Doge Francesco Erizzo, une Addolorata de Palma le Jeune, et une Cène de Santacroce (peu visible car sous l'orgue de la contre façade). 

Le plafond est plat mais décoré en trompe-l'œil qui imitent les murs réels.

Le tibia de Saint Martin est conservé dans l'église comme la relique la plus importante.

Anecdote : bien avant Halloween, dans ce quartier de Venise, les enfants allaient quémander le 11 novembre (fête de la Saint Martin), des friandises aux portes des maisons, en chantant des chansons pour les habitants. 

Je ne peux pas résister à ce que raconte  Monica Cesarato dans son log de cuisine et sur la page :

https://www.monicacesarato.com/blog/2010/11/10/san-martino-venice/

A Venise les enfants célèbrent la Saint Martin en courant dans les rues en faisant du bruit avec des casseroles, et en chantant (traduction approximative mais l'idée est là):


A noter de grosses différences  sur https://lucasitaly.com/2017/11/06/venetian-trick-or-treat-san-martin-recipe/
Oh che odori de pignata Se magnè bon prove fazza Se ne de del bon vin cantaremo San martinSan martin n’à mandà qua Perchè ne fe la carità Anca lu co’l ghe n’aveva Carità ghe ne faseva.Fe attenzion che semo tanti E fame gavemo tuti quanti Stè atenti a no darne poco Perchè se no stemo qua un toco!
"Quelles bonnes odeurs dans ces pots, si nous mangeons bien nous nous porterons bien, Si on nous donne du bon vin nous chanterons Saint MartinSaint Martin nous a envoyé ici  parce que nous demandons votre charité car lui aussi il en fit beaucoupFaites attention, nous sommes nombreux, et avons faim, faites en sorte de ne pas nous donner peu sinon nous resterons ici encore longtemps."

S'ils obtiennent satisfaction avec des bonbons ou autres pâtisseries, 

E con questo la ringrasiemo Del bon animo e del bon cuor Un altro ano ritornaremo Se ghe piease al bon Signor Viva viva San Martin

ils chantent ensuite 




"Avec cela, merci beaucoup pour votre bonne âme et votre bon coeur, nous reviendrons l'année prochaine, s'il plaît à notre bon Seigneur, vive vive Saint Martin".

Si on ne leur donne rien ils chantent tout de même une incantation :

Tanti ciodi gh’è in sta porta Tanti diavoli che ve porta Tanti ciodi gh’è in sto muro Tanti bruschi ve vegna sul culo




Autant qu'il y a de traces d'ongles sur cette porteAutant de diables viendront sur vousAutant de traces d'ongles sur ce murAutant de feux vous brûleront le cul

Sur Saint Martin de Tours

St Martin, né en 317 en Pannonie (Hongrie), vit son enfance près de Padoue. Son père, militaire capitaine de la cavalerie romaine et païen, l'empêche à 10 ans d'entrer dans les ordres chrétiens et le force, comme lui-même, à s'engager à 15 ans.  A 18 ans (il s'était fait baptiser en cachette), il est inspecteur de nuit de la garnison près d'Amiens, et un soir il rencontre un mendiant frigorifié. Avec son épée il taille en deux sa cape pour lui donner une moitié (l'uniforme étant payé pour moitié par lui-même, l'autre par l'armée, il donna sa partie propre). La nuit suivante le Christ lui apparaît vêtu de cette cape. Après de multiples péripéties légendaires, il fonde un ermitage à Ligugé dans la Vienne (encore visité) près de Poitiers en 360, refusant de devenir prêtre pour servir les pauvres. Mais en 371 les habitants de Tours l'élisent de force évêque, mais il continue à prêcher dans les campagnes, il fonde l'ermitage de Marmoutier fréquenté par des notables d'où sa réputation internationale. Il meurt en novembre 391 (ou le 8 novembre 397 selon d'autres sources), et son corps est amené et enterré le 11 à Tours. Et cela fait fleurir les fleurs et les arbres (d'où l'été de la Saint Martin tard en automne pour définir un temps très doux à cette époque où parfois les plantes se trompent de saison et font des fleurs) sur son passage. Sa cape (chape) est envoyée à Aix la chapelle pour Charlemagne, le mot est à l'origine de chapelle, et du mot Capet et Capétien. 4000 églises en France portent son nom. Il a contribué à créer les premiers monastères en Gaule. Il est aussi le Patron des ânes.

Dans toute la Vénétie on a coutume de faire la pâtisserie "le Saint Martin" qui est une pâte brisée recouverte de douceurs (voire de pièces de monnaie aussi pour la fête des enfants) et en forme de cavalier.

(note : j'ai d'autres photos personnelles  mais ci-dessus, j'ai voulu en mettre une de Wikimedia pour leur apporter mon soutien ici)

Adresse : Castello 2423 Fondamenta di Fronte

Horaires : Lun-Sam 08:00-11:00 16:30-19:00 (attention autre source : 11:00-12:00 17:00-18:30)

Fête à Venise : le 11 novembre, les pâtisseries proposent les gâteaux (en forme de saint sur son cheval) et les enfants mangent des châtaignes, marchent en ville en chantant et en recevant des friandises, et on buvait le vin nouveau.


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L'église, fondée au 7ème siècle, est refaite au 10ème siècle, et enfin reconstruite de 1546 à 1610 sur un plan de Sansovino (la façade date de 1897).

La façade a été tournée de 90 degrés, le chœur est au sud et le campanile de 22m à côté. Une bouche de vérité orne la droite du portail. 

A droite, l'oratoire de la Scuola di San  Martino, au-dessus de la porte, un bas-relief de Saint Martin en cavalier donnant sa cape aux pauvres. (visite par la droite)  

Contre-façade intéressante avec un bel orgue de Nacchini restauré par les frères Callido. 

Au balcon de l'orgue, une Cène grandiose mais peu visible de Girolamo da Santacroce (1549). (pas de chien couché par terre et Jean à gauche de Jésus). (image Saikko Wikimedia Commons) 

L'intérieur en croix grecque avec huit chapelles se faisant face, laissant une grand espace carré au centre. Les fresques au-dessus des arcades sont de Jacopo Guarana.

Contre l'entrée à droite : Sainte Cécile et Saint Lorenzo Giustiniani, (Giovanni Segala).

Le flanc droit et la porte latérale donnant sur le rio di Ca di Dio et la Fondamenta del Piovan. 

Sur le flanc droit : la Sainte Famille avec Saint Marc et l'évêque Foca, (Giovannni Laudis).

Urne funéraire au Doge Francesco Erizzo, (Matteo Carnero, 1633) dont le cœur est à Saint Marc. Elu en 1631 en pleine peste à Venise, il verra débuter la guerre de Candie (Crète), la prise de La Canée par les Turcs. 

Il sera nommé Capitaine général en 1645 (mais il meurt de stress tout de suite après à plus de 80 ans).Son palais est juste derrière lui de l'autre côté du rio Ca de Dio. 

A gauche du Doge, chapelle de la Vierge des Douleurs ou Piétà (Mater Dolorosa), entourée de 3 anges tenant les symboles de la Passion. (Palma le Jeune).

Chapelle à droite du chœur, la Résurrection du Christ, (Girolamo da Santa Croce)

Autel de Tullio Lombardo. Le maître-autel se trouve derrière la table nouvelle drapée, mais devant aussi un autre petit autel situé au fond. 

Derrière ce tabernacle, un petit autel et sur les murs, le Christ flagellé, et le Christ au Calvaire. 

La voûte, éclairée par la fenêtre plein sud, est peinte à fresque mais difficile à voir (gloire de San Martino ??) 

De part et d'autre du maître-autel, à gauche le Sacrifice d'Abraham, (Fabio Canal).

Sacrifice de Melchisedech, à droite (Fabio Canal).

Chapelle à gauche du chœur, le Christ en croix. 

Chapelle sur le flanc gauche : Santa Orsola, Santa Lucia et Santa Augusta (18 ème).

Flanc gauche. Les transepts sont réduits au minimum (faute de place ? ou conception originale de Sansovino ?). 

La chaire, faisant face au monument du Doge Erizzo (Sebastiano Messenali, 1752). Bas-relief du balcon avec la Samaritaine au puits (sous réserves). 

Chapelle de la Vierge. 

Chapelle à gauche de l'entrée : Saint Jean écrivant l'Apocalypse (Matteo Ponzone) (sous réserves). 

Plafond avec San Martino en gloire (Jacopo Guarana). 

On passe dans la sacristie, très étonnante par son plafond complètement peint à fresque. 

Les bandes blanches occultent les peintures qui rappellent un peu le plafond de Sant'Alvise à Cannaregio (pour les couleurs claires, le bleu et les contrastes). 

(Sous réserves, mémoire défaillante) : tableau d'Antonio Zanchi, La Vierge en gloire avec les Saint Joseph et Antoine de Padoue (Giuseppe et Antonio di Padova).