Guide en images des églises de Venise
San Martino Vescovo (Castello)
v5 202507
Nouveau : San Luca (San Marco) v1 20250704 et San Martino (Castello) v5 entièrement refaite
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La première église est fondée selon certains à la fin du 6ème siècle, ou au 7ème siècle, selon d'autres au 8ème siècle, à la dévotion de Saint Martin de Tours (voir plus bas), donc par des habitants ici venus de Lombardie. Vers 930 gelle est reconstruite en style vénéto-byzantin par les familles Vallaresso et Salonigo, et consacrée en 932. Par la suite, un conflit éclate entre ecclésiastiques qui rattachent la paroisse au patriarcat de Grado (elle dépendait avant de San Pietro di Castello donc de Venise), conflit qui se termine en 1451 avec la suppression de Grado comme patriarcat, Venise devenant le seul patron de la région.
L'église est reconstruite en style Renaissance, de 1546 à 1610 (très long mais les Arsenalotti qui peuplaient majoritairement le coin n'étaient pas riches …) Elle ne fut consacrée qu’en 1653 ! L’architecte est Jacopo Sansovino, un des plus grands à Venise avec Palladio, les Lombardo, ou Codussi entre autres. Comme c'est le cas d'un grand nombre de reconstructions d'églises à Venise, Sansovino hange son orientation vers le canal de l'arsenal. Il a aussi créé un plan carré classique en croix grecque avec 8 chapelles en face à face qui la font paraître plus grande. Elle a été restaurée en 1973. (mais sa façade date de 1897).
Large façade en briques à la Sansovino donnant sur le campo et le rio de l'arsenal juste en face. Elle fut refaite à la fin du 19ème par Domenico Rupelo qui garda le portail de Sansovino. Sur le côté on ne voit pas grand-chose car le flanc droit de l'église est très proche du rio Ca de Dio, avec le campanile derrière, assez haut (22m) mais peu visible sauf depuis les ponts enjambant les rii. Deux oculus éclairant les chapelles derrière, de chaque côté du portail imposant en pierre d'Istrie. A gauche se trouve une bouche de vérité avec une tête de lion (il y en a beaucoup à Venise). Mais attention, les inspecteurs vérifiaient soigneusement ces dénonciations, et le dénonciateur était très sévèrement puni si ce n'était pas vrai.
A droite de la façade se trouve l'oratoire de la Scuola de San Martino et son portail en pierre d'Istrie, au-dessus duquel on peut voir un bas-relief du 16ème siècle représentant Saint Martin à cheval partageant son manteau avec un pauvre frigorifié près d’Amiens. La Scuola fut construite en 1530 par l'Arte dei Calafai la guilde des Calfeutreurs de l’Arsenal tout près. Partiellement reconstruite en 1584, elle est restaurée plus tard en 1774 (1772 ?), et témoigne de l’importance des Scuole à Venise, institutions laïques mais souvent patronnées par un Saint, et dont le rôle d’assistance aux pauvres, aux malades ou aux veuves de la corporation étaient primordial. Les Scuole, grâce au patronage d’un Saint, recevaient beaucoup d’argent et de legs des fidèles (voir par exemple la Scuola di San Rocco).
Au-dessus de la porte se trouve un bas-relief de Saint Martin partageant son manteau avec le pauvre, évènement qui a fait la réputation de Martin de Tours dans le monde entier.
Intérieur
La décoration intérieure actuelle est beaucoup plus tradive que le bâtiment, et date majoritairement du 18ème siècle. Les huit chapelles placées aux 4 coins façonnent l'aspect en croix grecque de l'église et forment une vaste zone carrée qui rend presque indissociables la nef et le transept.
On peut y voir entre autres le monument funéraire du Doge Francesco Erizzo, une Addolorata de Palma le Jeune, et une Cène de Santacroce (peu visible car sous l'orgue de la contre façade).
Le plafond est plat mais décoré en trompe-l'œil en prolongeant la décoration des murs réels.
Le tibia de Saint Martin est conservé dans l'église comme la relique la plus importante.
Anecdote : bien avant Halloween, dans ce quartier de Venise, les enfants allaient quémander le 11 novembre (fête de la Saint Martin), des friandises aux portes des maisons, en chantant des chansons pour les habitants.
Anecdote : bien avant Halloween, dans ce quartier de Venise, les enfants allaient quémander le 11 novembre (fête de la Saint Martin), des friandises aux portes des maisons, en chantant des chansons pour les habitants.
Premier couplet et refrain de la comptine (édulcorée) pour les petits :
Martin xe ‘ndà in sofita
a trovar ea nonna Rita
nona Rita no ghe gera
S.Martin col cùeo par tera
E col nostro sachetìn
cari signori xe S.Martin.
Traduction pour les enfants :
Saint Martin est allé au grenier
Pour rendre visite à mamie Rita
Mamie Rita n’était pas là
Saint Martin avec le cul par terre
Et avec notre petit sac
Mesdames et messieurs c’est la Saint Martin.
La version (pour adultes ) est plus explicite, mais chut ! Elle raconte autre chose. Il y a très longtemps, Martino, un vieil homme veuf qui habitait à Castello, courtisait les filles jeunes. Tout le monde se moquait de lui. Mais un jour, l’une d’elles succombe, non pas au charme de Martino mais plutôt à sa fortune. Martino considère la jeune comme sa promise. Un jour, il monte dans la soupente où vivait la jeune fille et la trouve en douce compagnie. Il en fut tellement surpris, qu’il en tomba le cul par terre…
Je ne peux pas non plus résister à ce que raconte Monica Cesarato dans son blog de cuisine et sur la page :
https://www.monicacesarato.com/blog/2010/11/10/san-martino-venice/
A Venise les enfants célèbrent la Saint Martin en courant dans les rues en faisant du bruit avec des casseroles, et en chantant (traduction approximative mais l'idée est là):
S'ils obtiennent satisfaction avec des bonbons ou autres pâtisseries, ils chantent ensuite
E con questo la ringrasiemo Del bon animo e del bon cuor Un altro ano ritornaremo Se ghe piease al bon Signor Viva viva San MartinSi on ne leur donne rien ils chantent tout de même une incantation :
Tanti ciodi gh’è in sta porta Tanti diavoli che ve porta Tanti ciodi gh’è in sto muro Tanti bruschi ve vegna sul culoSur Saint Martin de Tours
St Martin, né en 317 en Pannonie (Hongrie), vit son enfance près de Padoue. Son père, militaire capitaine de la cavalerie romaine et païen, l'empêche à 10 ans d'entrer dans les ordres chrétiens et le force, comme lui-même, à s'engager à 15 ans. A 18 ans (il s'était fait baptiser en cachette), il est inspecteur de nuit de la garnison près d'Amiens, et un soir il rencontre un mendiant frigorifié. Avec son épée il taille en deux sa cape pour lui donner une moitié (détail croustillant de la légende : l'uniforme étant payé pour moitié par lui-même, l'autre par l'armée, il donna sa partie propre). La nuit suivante le Christ lui apparaît vêtu de cette cape.
Après de multiples péripéties légendaires, il fonde un ermitage à Ligugé dans la Vienne (encore visité) près de Poitiers en 360, refusant de devenir prêtre pour servir les pauvres. Mais en 371 les habitants de Tours l'élisent de force évêque, mais il continue à prêcher dans les campagnes, il fonde l'ermitage de Marmoutier fréquenté par des notables d'où sa réputation internationale.
Il meurt en novembre 391 (ou le 8 novembre 397 selon d'autres sources), et son corps est amené et enterré le 11 à Tours. Et cela fait fleurir les fleurs et les arbres (d'où l'été de la Saint Martin tard en automne pour définir un temps très doux à cette époque où parfois les plantes se trompent de saison et font des fleurs) sur son passage.
Sa cape (chape) est envoyée à Aix la chapelle pour Charlemagne, le mot est à l'origine de chapelle, et du mot Capet et Capétien.
4000 églises en France portent son nom. Il a contribué à créer les premiers monastères en Gaule. Il est aussi le Patron des ânes.
Dans toute la Vénétie on a coutume de faire la pâtisserie "le Saint Martin" qui est une pâte brisée recouverte de douceurs (voire de pièces de monnaie aussi pour la fête des enfants) et en forme de cavalier.
(note : il a été difficile de retrouver toutes les informations souhaitées pour décrire San Martino, un lecteur plus expert pourra volontiers m’envoyer des explications utiles, merci par avance).
(note : j'ai d'autres photos personnelles mais ci-dessus, j'ai voulu en mettre une de Wikimedia pour leur apporter mon soutien ici)
Adresse : Castello 2423 Fondamenta di Fronte
Horaires : Lun-Sam 08:00-11:00 16:30-19:00 (attention autre source : 11:00-12:00 17:00-18:30)
Fête à Venise : le 11 novembre, les pâtisseries proposent les gâteaux (représentant le Saint sur son cheval) et les enfants mangent des châtaignes, marchent en ville en chantant et en recevant des friandises, et on buvait le vin nouveau.
Rev5 11/07/2025 (version totalement nouvelle)
L'église, fondée au 7ème (ou 8ème) siècle pour révérer Saint Martin de Tours. En 930 elle est reconstruite en style vénéto-byzantin par des familles nobles de l’endroit.
Vue depuis le Ponte dei Pennini. et enfin reconstruite de 1546 à 1610 sur un plan de Jacopo Sansovino, en croix grecque et 8 chapelles. Vue depuis le rio delle Gorne. Tout à droite la Scuola et le campanile.
La façade est refaite en 1897, et une restauration a eu lieu en 1973. Vue du Ponte Storto entre du rio del Arco (au nord) et le rio de la Ca di Dio (vers le sud).
A droite, l'oratoire de la Scuola di San Martino, au-dessus de la porte, avec un bas-relief de Saint Martin en cavalier donnant sa cape aux pauvres.
La façade a été tournée de 90 degrés sur le rio di San Martino au nord, le chœur est au sud et le campanile de 22m à côté. Une bouche de vérité orne la droite du portail.
L'intérieur en croix grecque avec huit chapelles se faisant face, laissant une grand espace carré au centre.
Les fresques au-dessus des arcades sont de Jacopo Guarana. (sous réserves).
(visite par la gauche)
Flanc gauche. Les transepts au milieu sont réduits au minimum (faute de place ? ou conception originale de Sansovino ?).
Chapelle à gauche de l'entrée : Saint Jean écrivant l'Apocalypse (Matteo Ponzone) (sous réserves).
Chapelle latérale gauche de la Vierge.
Cette statue de la Vierge est l’une des plus belles de Venise.
La chaire, partie gauche du transept très étroit ici, faisant face au monument du Doge Francesco Erizzo (Sebastiano Messenali, 1752).
Bas-relief du balcon avec la Samaritaine au puits (sous réserves).
Au sol sous la chaire à gauche de la porte la porte, une table d’autel du 15ème siècle (qui sert aussi aux fonds baptismaux).
Les pieds de cet autel sont des anges en prière. On reconnait tout de suite la patte des Lombardo (ici Tullio fils de Pietro), Ils proviennent de l’ancienne église du Saint Sépulcre (San Sepolcro) située sur Riva degli Schiavoni.
Abimés par une acqua alta en 1966, ils furent restaurés par VENICE IN PERIL. Ces figures et les postures se retrouvent à Santa Maria dei Miracoli, ou mieux encore, au portail de la Scuola San Giovanni Evangelista.
(parenthèse : L’ange de l’Annonciation aux Miracoli.
Sur le portail de la Scuola di San Giovanni Evangelista à San Polo (Pietro Lombardo, vers 1486).
fin de la parenthèse)
Poursuivons la visite du flanc gauche.
Chapelle latérale gauche : Santa Orsola, Santa Lucia et Santa Augusta (18 ème siècle).
Augusta (Augustine), convertie secrètement mais surveillée par son père païen, qui la découvre en train de prier. Il l'emprisonne, lui arrache les dents, la torture et enfin la décapite avec sa propre épée à Serravalle.
Orsola (Ursule) capturée par les Huns à Cologne, refuse d'épouser leur chef, elle est criblée de flèches, ainsi que ses suivantes vierges, au nombre de onze mille.
Pour Lucia, voir le guide ou la page web consacrée à l’église San Geremia e Lucia (Cannaregio).
La Vierge et l’Enfant au-dessus des Saintes.
Chapelle absidiale gauche de Mater Dolorosa, avec le Christ en croix.
Remarquez la Vierge de douleur avec une épée traversant son cœur, thème classique repris partout (Dürer, Marten de Vos, etc).
Le choeur, avec le bel autel de Tullio Lombardo.
Le maître-autel se trouve derrière la table récente drapée de blanc. Les statues sur les côtés représentent à gauche Saint Martin en évêque, et à droite un saint non identifié.
Derrière le tabernacle, se trouve encore un petit autel qu’on ne voit pas, avec sur les murs le Christ flagellé, et le Christ au Calvaire.
Sur le mur à gauche du maître-autel le Sacrifice d'Abraham, (Fabio Canal).
Le Vénitien Fabio Canal est un disciple de Gianbattista Tiepolo et a travaillé avec Jacopo Guarana (qui a peint la Gloire de Saint Martin au plafond).
Sacrifice de Melchisedech, à droite (Fabio Canal).
Il était roi de Salem, et rencontra Abraham revenant d’une victoire, en faisant le sacrifice du pain et du vin (très obscure légende, car il n’est cité que 2 fois en tout dans l’Ancien Testament, qui l’appelle le Grand Sacrificateur, précurseur du Christ).
La voûte, éclairée par la fenêtre plein sud, est peinte à fresque mais difficile à voir. Au centre, une fresque imposante. Un aigle s’envole de la fausse corniche, un ange tient un encensoir, des têtes émergent des nuages.
Au Ciel Dieu et le Christ, et des anges, dont un, immense, aux ailes noires et la chevelure blonde et fournie, porte un flambeau et semble descendre sur la Terre.
On passe à la chapelle absidiale droite.
Chapelle à droite du chœur, la Résurrection du Christ, (Girolamo da Santa Croce).
Mort à Venise en 1556, c’est un élève de Giovanni Bellini et un maître de la peinture Renaissance à Venise.
On trouve ses tableaux en de nombreux endroits à Venise (San Zulian, Madonna del orto, etc) mais aussi dans des musées du monde entier.
Aux coins de la nef en haut des chapelles, les fresques monochromes (Jacopo Guarana, sous réserves.)
Aux coins de la nef en haut des chapelles, les fresques monochromes (Jacopo Guarana, sous réserves.)
La chapelle de la Piétà, avec un Palma le Jeune de médiocre facture.
Le décor en arrière-plan est très intrigant (fenêtres à barreaux, arcades doubles en haut à gauche)
Sur le mur gauche, un tableau (naïf) avec Martino (descendu de cheval) allant couvrir le pauvre de son manteau.
Sur le mur droit, le Christ et des Saints (NonID).
Le transept droit (curieusement moins profond que les chapelles latérales) avec l’urne funéraire au Doge Francesco Erizzo, (Matteo Carnero, 1633) dont le cœur est à Saint Marc.
Elu en 1631 en pleine peste à Venise, il verra débuter la guerre de Candie (Crète) avec la prise de La Canée par les Turcs.
Il sera nommé Capitaine général en 1645 (mais il meurt de stress tout de suite après à plus de 80 ans).Son palais est juste derrière lui de l'autre côté du rio Ca de Dio.
Mur gauche, une Annonciation avec un ange tenant un papyrus ?
Sur le mur droit, peut-être la rencontre de Marie et sa cousine Elisabeth.
Chapelle de la Sainte Famille.
Sur un trône, la Vierge et l’Enfant, avec Saint Marc et le lion ; et l'évêque Foca,(Giovanni Laudis).
Laudis (ou Lauclis) est un peintre dominicain peu connu vivant à Venise et mort en 1631, d’influence de Palma le Jeune.
Sur les murs, des restes de fresques Renaissance.
On arrive à la chapelle à droite de l’entrée, avec un tableau de Giovanni Segala.
Le retable Santa Cecilia et San Lorenzo Giustiniani.
La voûte ancienne peu visible et indécryptable, avec des anges aux ailes grises imposantes.
La magnifique contre-façade, avec un orgue de Nacchini restauré plus tard par les inévitables et talentueux frères Callido.
Un des deux anges soutenant le tableau au balcon de l’orgue (Matteo Calderoni, 1737).
Le balcon (ou cantoria) est décoré avec une Cène de Girolamo Santacroce de 1549.
Le plafond plat, œuvre du Brescian Domenico Bruni prolonge en trompe-l’œil les murs de la nef. Presque aussi impressionnant que celui de Fiumani à San Pantalon (San Polo).
Au centre, la fresque de Jacopo Guarana avec Saint Martin en gloire.
On passe dans la sacristie, accessible depuis la chapelle gauche.
Le plafond est peint à fresque. Les couleurs (bleu en particulier) rappellent le plafond de Sant’Alvise à Cannaregio.
Curieusement, des bandes irrégulières sont peintes en blanc comme si le plafond possédait avant des poutres qui auraient été enlevée.
On y trouve un retable avec un tableau d’Antonio Zanchi, La Vierge en gloire avec Joseph et Saint Antoine de Padoue.