Guide en images des églises de Venise

Santa Maria della Fava (Castello)

Santa Maria della Consolazione est le nom exact de l'église, que tout le monde a oublié pour Santa Maria della Fava (de la Fève).

Histoire

L’origine du nom « della Fava » est incertain tant les hypothèses sont nombreuses, au choix : 1) d’un magasin proche vendant des fèves, 2) d’un magasin vendant des pâtisseries ayant la forme d’une fève (Fave dei Morti) et produites à la Toussaint, 3) de la famille Fava habitant ici, ou encore plus attirant, 4) d’un voleur qui transportait du sel dans un sac sous des fèves, il est arrêté par les gendarmes qui vont le fouiller, il fait une prière devant l’image sacrée et le sel enfoui au fond disparait du sac, les gendarmes fouillent mais évidemment le laissent partir.

En 1480, la famille Amadi, influente dans ce quartier, demande au Patriarche Matteo Gerardi, avec l’appui de quelques nobles aux noms connus (Francesco Diedo, Francesco Zen et Marco Soranzo), d’élever ici un oratoire pour conserver une image de la Vierge de la Consolation, située sur la Ca' Dolce toute proche, et qui avait produit de nombreux prodiges auprès des habitants venus la prier.

L’enquête prouva sans détour qu’il ne s’agissait pas de racontars fanatiques, mais de véritables miracles. Les offrandes de fidèles permirent d’acheter deux maisonnettes dont la Ca' Dolce, et de bâtir à la place une chapelle de bois en 1496, où l’image put reposer sur le retable de l’autel. On peut distinguer la chapelle sur la Veduta de Barbari en 1500. Le 12 mai 1573, la chapelle, ayant obtenu l’année précédente le droit d’y conserver l’eucharistie, est solennellement consacrée à Sainte Marie de la Consolation par l’évêque de Caorle, Giulio Superchio. La dévotion populaire devint si grande que le pape Grégoire XV déclare l’autel « privilégié » et en 1621 accorde l’indulgence plénière à qui visitera la chapelle le jour de la fête de la Visitation de la Vierge !

Les frères de l’Ordre des Philippins (ou Oratoriens) (fondé par Saint Philippe de Néri), souhaitant un oratoire aussi, se voient accorder la chapelle pour leur Ordre en 1662, confirmé par Clément X en 1674 qui déclare la Congrégation dépendante du Patriarcat de Venise.

En mars 1701, les frères Philippins demandent au Doge Alvise II Mocenigo de s'agrandir avec une nouvelle église, et en 1705 la première pierre est posée, avec Gaspari comme architecte. En 1715 l’Ordre des Philippins périclite, plus d’argent, mais les travaux reprennent avec Giorgio Massari qui termine la coupole et le toit. La façade restera inachevée, comme bien d’autres (San Marcuola, San Pantalon, etc), le beau portail baroque en marbre, est là pour soutenir la structure. Les autels latéraux sont construits en 1725.

L’église est consacrée en 1753 par le patriarche Alvise Foscari.

En 1810, Napoléon ferme l’Ordre des Philippins, mais celui-ci est rétabli en 1821, pour s’éteindre en 1912, et l’église est attribuée aux Pères Redentoristi.

Extérieur

L'église est engoncée dans les maisons et seule une partie de la façade est bien visible. Rien de spécial d'ailleurs, elle est en briques comme presque toutes les autres églises de Venise, et seul le portail baroque, imposant par rapport à la petitesse de l'intérieur, est orné d'un encadrement en pierre d'Istrie. Un gros oculus au-dessus et un plus petit en haut du toit à 2 pentes, et deux niches désespérément vides complètent cette façade banale.

Rappelons qu'en 1736, l’ancienne chapelle de Santa Maria della Fava est entièrement démolie, mais en mémoire, on a tracé le périmètre de la chapelle par des bandes de marbre blanc au sol sur le campo (encore visibles aujourd’hui).

Intérieur

Si l'extérieur est à l'instar de beaucoup d'églises à Venise, dénué d'intérêt (la façade n'a jamais été terminée et seul le portail porte du marbre blanc), l'intérieur offre d'intéressantes œuvres d'art qui méritent le détour. La nef simple, flanquée de trois chapelles de chaque côté, est blanche avec des motifs en pierre plus sombre entourant les murs et les colonnes corinthiennes. On y trouve des Piazzetta, un Tiepolo magnifique (l'Education de la Vierge) et des statues du Torretto (G. Bernardi, professeur de Canova, appelé aussi Il Torretino, ou même Torretti) ainsi qu'un Lazzarini et 2 Amigoni du mi-18ème, sans oublier Sainte Marie de la Consolation (15ème).

Giovanni Battista Piazzetta est enterré ici, dans la tombe de la famille Albrizzi, située entre le 2ème et le 3ème autel du côté droit de la nef (Piazzetta mourut dans la pauvreté, son ami Albrizzi fit en sorte de l’enterrer ici, dans un lieu plus décent que les fosses communes).

S’y trouve aussi une quantité importante de reliques rapportées ici après la chute de Candie par Francesco Morosini et données en 1690 par Regina Giustinian Morosina puis en 1693 par le Doge : la Croix (2 fragments !), une épine de la couronne du Christ, des cheveux de la Vierge, le pied de Saint Mamante martyr, d'autres reliques concernant San Filippo Neri, Santa Anna, San Francesco (Saint François de Sales), San Bartolomeo, San Lorenzo, Pie V, San Carlo, San Cristoforo, San Lazzaro, Santa Marta, et Marie-Madeleine (source Veneziamuseo). Il faut dire que depuis le haut Moyen-Age, un intense marché aux reliques faisait rage sans discontinuer à Byzance et Jérusalem, et tout commerçant vénitien qui passait là se devait de rapporter à la République une relique, fausse ou non. Certains ont compté des dizaines de fémurs, des centaines de doigts, attribués aux mêmes Saints en Europe.

Références

www.churchesofvenice.co.uk

http://www.veneziamuseo.it/

Adresse : Campo della Fava, Castello

Horaires : Lun-Sam 08 :30-11 :30, 16 :30-19 :00

rev4 21/11/2019

Au début du 15ème siècle, de nombreuses images saintes ornaient les murs, et l'une d'elles (la Vierge de la Consolation) semblait faire de nombreux miracles, faits corroborés officiellement en 1480 par Matteo Gerardi patriarche de Venise.

L’église actuelle est engoncée dans les maisons, sa façade inachevée n’est pas décorée.

Mais au sol, sur le campo, la trace en marbre de la chapelle en bois terminée en 1496 par la famille des Amadi pour accueillir l'icône en donne un souvenir.

Seuls le portail (porteur de la structure) et l’escalier ont été réalisés en marbre.

A l'entrée, 2 statues d’anges en guise de bénitiers et sur la contre-façade, une dédicace à l’intitulé de l’église.

Trois chapelles de part et d’autre, et sur les 8 énormes piliers, des niches contenant des statues (poussiéreuses ?).

Entre les autels des niches, Jean et Marc à droite, Matthieu et Luc à gauche. Au-dessus, des hauts d'épisodes de la vie de San Filippo Neri, (le créateur de l'ordre des Oratoriens /Philippins, très populaire ici).

Aux 4 coins, les Docteurs de l'Eglise. Statues et hauts reliefs sont de G. Bernardi (dit Il Torretto, il fut le professeur de Canova). (visite par le flanc droit).

Entre les autels des niches, Jean et Marc à droite, Matthieu et Luc à gauche. Au-dessus, des hauts d'épisodes de la vie de San Filippo Neri, (le créateur de l'ordre des Oratoriens /Philippins, très populaire ici).

Premier autel : Sainte Anne, La Vierge à l'enfant et Saint Joachim. En décembre 1993, des voleurs se cachent dans un confessionnal pour voler le tableau, mais leur couteau n’arrive pas à découper la toile, ils abandonnent, partent manger !

Ensuite ils reviennent et finissent par emporter la toile, qu’ils comptaient découper en quatre, mais la toile est retrouvée trois mois plus tard dans une ferme près de l’aéroport.

Autre nom du tableau : l'Education de la Vierge.

C'est un grand classique, chef d’œuvre de jeunesse de Giambattista Tiepolo (1732).

Deuxième autel : la Visitation par J. Amigoni (1743).

Sur l’autel dans une niche en marbre, l’icône de Sainte Marie de la Consolation (15ème siècle, auteur inconnu) qui existait sur le campo.

Madonna col Bambino e San Gregorio Barbarigo (évêque et cardinal, enseignant à Padoue) (G. Cignaroli, 1761).

Le chœur : baroque, en bois doré et argenté, avec des scènes de l’eucharistie (1738), et le bel orgue avec des décorations dorées de Pietro Nacchini (1754).

Le tabernacle en marbre et deux anges sont du célèbre Gian Maria Morlaiter. La Fava a su attirer des chefs d'œuvre qu'on n'imaginerait jamais ici.

A gauche du chœur, 3ème chapelle, Le Christ crucifié entre la Vierge, Saint Jean et Marie-Madeleine.

(Cristo crocifisso tra la Vergine, San Giovanni e Maria Maddalena), Gregorio Lazzarini (1731).

2ème chapelle : L’apparition de la Vierge à Philippe de Néri (Apparizione della Vergine a San Filippo Neri), G.B. Piazzetta (1731), qui a peint aussi de nombreux chefs d'œuvre présents dans les grands musées du monde entier (Louvre, Chicago, etc.).

C'est incroyable que Piazzetta soit mort (1754) dans la plus grande pauvreté, il repose ici dans la tombe de la famille Albrizzi, grâce à son ami Gian Battista Albrizzi, imprimeur et libraire fameux de Venise.

La Vierge à l’Enfant avec Saint François de Sales (Madonna col Bambino e San Francesco di Sales), G. Amigoni (1743).

La Fava abrite aussi de nombreuses reliques données par le Doge Morosini en 1690-1693 après la perte de Candie (Crète) : 2 fragments de la Croix, une épine de la couronne, des cheveux de la Vierge, pied de Saint Mamante, le corps de 8 martyrs.