Guide en images des églises de Venise

Gli Scalzi  (Santa Maria di Nazareth)

(Cannaregio)

Histoire 

Une petite église et le monastère attenant ont été construits en 1649 sur autorisation du Sénat sous le dogat de Gianfranco Morosini. C’est en grande partie l'œuvre du père Carmélite "Déchaussé" Agatangelo da Gesù e Maria, venu à Venise en 1633 pour installer l'Ordre tout d'abord à San Gregorio en 1647 puis sur ce terrain acquis au bord du Grand Canal. 

L'église est consacrée à une image sacrée de Sainte-Marie de Nazareth (provenant de cette île de la lagune qui plus tard sera nommée Lazzaretto Vecchio). Les "Déchaussés" ou "Déchaux" sont des moines Carmélites "purs et durs", qui ont fait vœu de pauvreté, ne travaillent pas et vivent d'oboles (le terme "déchaussés" est mal adapté car en fait ils portaient des sandales, mais pas de chaussettes). 

En 1656, l'église devenue trop petite (11m par 30) est démolie, pour une plus grande et toujours pour les "Déchaussés", mais la nouvelle église, qui est financée par la riche famille patricienne de Girolamo Cavazza, est un monument baroque où tous les excès en statues, marbres, dorures et tableaux sont présents, à l'opposé complet de la Règle de ces moines Carmélites (une ambiguïté demeure car c'est un Carme qui prit la direction des travaux mais en fait les Carmélites possédaient déjà de magnifiques églises en Espagne et à Rome, et celle de Venise devait aussi être extraordinaire. Curieux quand même ...). 

La conception et les travaux se font sous la direction de Baldassare Longhena (qui fit la Salute auparavant), mais il abandonne en 1672 pour des raisons inconnues. Par la suite c'est avec Giuseppe Sardi pour la façade et avec le Carmélite laïc Giuseppe Pozzo pour l'intérieur restant à faire, que finira sa construction jusqu'en 1680. Elle affiche une riche façade de 25m par 26 toute en marbre et statues, et un intérieur modifié avec 6 chapelles latérales et un chœur hyper baroque. Elle est consacrée en 1705. En 1723 le dernier prince de Castiglione, Ferdinand II Gonzague, y est enterré. L'ordre des Carmélites est supprimé, comme beaucoup d'autres, en mai 1810. Plus tard sous le gouvernement autrichien une restauration importante a lieu entre 1853 et 1862. Le plafond de Giambattista Tiepolo est détruit par une bombe autrichienne, il est remplacé après travaux par une fresque d'Ettore Tito. Quelques fragments ont été placés à l'Accademia.

Extérieur

La façade à trois étages, et considérée comme une œuvre baroque jolie, financée aussi à hauteur de 74000 ducats par un Cavazza (Conte), fut construite par Giuseppe Sardi entre 1672 et 1680. Parmi les nombreux sculpteurs y ayant participé citons Bernardo Falconi, Clemente Molli, Giovanni Bonazza. Dans les niches inférieures entourées de colonnes corinthiennes posées sur une solide base, on trouve de gauche à droite, S. Sebastiano, S. Maria Maddalena, S. Margherita et S. Giovanni Battista. L'entablement massif, lui aussi surmonté de 4 paires de colonnes soutenant le tympan triangulaire, comporte trois niches abritant au centre la Vierge à l'Enfant, entourée de statues de la Foi et de l'Espérance (cette dernière, absente, étant tombée vers 1920). Aux extrémités, on trouve Saint Jérôme à gauche et Saint Barthélémy à droite. Le tympan triangulaire comprend au centre le blason de la famille Cavazza, et au sommet 5 statues, de gauche à droite : Adam debout, Caïn couché, le Christ Rédempteur au sommet, Abel couché, et Eve tenant deux pommes.

Intérieur

L'intérieur très chargé, haut de 24 mètres, est en marbres polychromes avec de chaque côté de la nef centrale trois chapelles, celles du centre étant beaucoup plus hautes et larges que les autres. Les chapelles et le chœur ont été financées, comme très souvent, et richement, par des Patriciens vénitiens. 

Les pavements des chapelles et du chœur sont en marbres polychromes. Au sol, plus de 60 pierres tombales dont celle de Ludovico Manin le dernier Doge de Venise. Malgré les 14 fenêtres on a une impression de grisaille et de contrastes forts. Les murs couverts de marbre de Lucques (marbre africain ancien de Seravezza) comportent des niches en nombre abritant des statues des apôtres et évangélistes.

Le maître-autel très imposant avec ses énormes colonnes de marbre africain avec au frontispice l'image de Sainte Marie de Nazareth, et sur les murs latéraux des Sibylles, est l'œuvre de Pozzo, comme d'autres autels dans l'église.

Au total, cette église jésuite comporte de nombreuses similitudes avec celle des Gesuiti, avec son luxe baroque, son foisonnement de marbres et de statues, ses chapelles surchargées, mais cela a un charme et dénote des autres églises de Venise.


Le campanile, derrière l'église, fait 37 mètres de haut.

Adresse : Cannaregio 54

Horaires : tlj 07:30-11:50 16:00-18:50

Site web : https://sites.google.com/site/scalzivenezia/home/depliantit

rev5 21/10/2023

Les Scalzi (Saint Marie de Nazareth) jouxtent la Gare sur le Grand Canal. Elevée fin 17ème par les Carmélites "Déchaussés", l'église est richement financée par la famille Cavazza sur des dessins de Sardi et Longhena. 

Belle façade baroque avec en haut de g. à d. : Adam debout, Caïn couché, le Christ Rédempteur au sommet, Abel couché, et Eve tenant deux pommes. Au centre du tympan les armoiries des Cavazza. 

Plus bas : La Vierge à l'Enfant au centre (Bernardo Falcone), entourée de statues de la Foi et de l'Espérance (cette dernière, absente, étant tombée vers 1920). Aux extrémités, on trouve Saint Jérôme (Girolamo) à gauche et Saint Barthélémy (Bartolomeo) à droite. 

Dans les niches inférieures entourées de colonnes corinthiennes posées sur une solide base, de g. à d. :, S. Sebastiano, S. Maria Maddalena, S. Margherita et  S. Giovanni Battista. 

L'église est grande, jésuite, baroque et surchargée à souhait, mais mal éclairée. 

L'ancienne fresque au plafond de GB Tiepolo, détruite par des bombes autrichiennes  en 1915, a été remplacée en 1929 (Ettore Tito). 

A l'intérieur, trois chapelles de chaque côté. 

Celles du milieu sont plus larges et plus hautes (visite par la droite). 

Chapelle de S. Giovanni della Croce, réformateur du Carmel, (statue de Bernardo Falconi). Au sommet, les trois Vertus théologales (Tommaso Ruer) : l'Espérance avec l'ancre, la Foi avec le calice et la Charité avec des putti sur la poitrine. 

La niche qui abrite le Saint en contemplation de la croix, a le fond en marbre de jaspe. Sous le nuage, deux anges de Bernardo Tabacco adorent le tabernacle des reliques du Saint. (Mécène : Giovanelli, autel du 18ème siècle de Ludovico David). 

Les pilastres imposants contiennent des niches abritant des statues. 

Les grandes sont les Apôtres, les bustes plus haut sont des Saints, évêques ou Evangélistes. 

Deuxième chapelle de Teresa di Gesù (d'Avila). Le groupe de marbre de la Sainte en extase, et les anges sont de Heinrich Meyring, et les colonnes monolithiques en marbre rouge de France. 

Au-dessus est figurée la Trinité, et sur les côtés, deux grisailles féminines dans de fausses corniches représentant l'Espérance et la Foi. Tombe de Carlo Ruzzini (le financeur), 130ème Doge de Venise de 1732 à 1735. 

A droite, le voyage de Sainte Thérèse protégée du danger par Saint Joseph et les anges (Bambini). 

Thérèse d’Avila (1515-1534), jeune orpheline, a défié son père pour satisfaire son penchant spirituel et rejoindre les Carmes. 

A gauche, le miracle eucharistique ou la communion miraculeuse de Thérèse.

Thème souvent illustré à Venise, où l'hostie saute des mains du prêtre vers la bouche de la Sainte. (Nicolo Bambini). 

La voûte, de Giambattista Tiepolo (1724), représente l'apothéose de Thérèse d'Avila, on y reconnait aussi l'habit des Carmélites. 

Hélas, sa fresque du plafond a disparu, et sur celle-ci on distingue de nombreuses fissures. 

Troisième chapelle de  Saint Jean Baptiste, conçue par Baldassare Longhena. La balustrade, le pavement, la face de d'autel et les quatre colonnes sont en jaspe noir (paragone). Statue du Saint de M. Barthel, (après 1680). 

Les éléments décoratifs aux murs et une inscription qui rappelle le mécène, le patricien Giambattista Mora, enterré sous l'autel. 

Sur la voûte, une œuvre de Pietro Liberi (fin 17ème), le Père Eternel gouvernant le monde. 

On retrouve les  statues aux coins du chœur (il parait que certaines sont cachées par d'autres décorations). 

Le chœur de G.B. Viviani enrichi ensuite par Giuseppe Pozzo.  

Au-dessus, des statues de bronze délicates et un dôme sous un baldaquin derrière à peine visible. 

On s'y perd en complexité … Noter les huit colonnes torsadées en marbre rouge de Vérone, et derrière tout cela (le chœur des Frères), des fresques monochromes (G et D Valeriani, 18ème). 

Sur le tabernacle (déjà très chargé) se dresse un petit temple à 2 étages et un dôme, de Baldassare Longhena  

L'image vénérée de Sainte Marie de Nazareth la patronne de l'église, relique rapportée du Lazzaretto Vecchio (en face du Lido).

Au-dessus, un montage complexe avec deux petites statues debout (à droite Thérèse d'Avila et à gauche Jean de la Croix), et au centre  le Christ Rédempteur. 

De chaque côté du Christ dans l'arc, deux Sibylles inclinées. On y trouve aussi la tombe de Benedetto Soranzo, Procurateur de Saint-Marc, mécène de l’autel. 

Au-dessus, la couronne sculptée sur bois doré d’où descend un pavillon en plomb doré. Une coupole en faux plâtres de Giuseppe et Domenico Valeriani domine l’ensemble.  

Sur chaque mur latéral hyper orné de marbres, on trouve 3 statues de Sibylles sur piédestal et 2 au-dessus, inclinées, de Giovanni Marchiori. 

Tiburtine (de Tivoli). 

Samia (de Samos). 

Mur gauche, au centre la Sibylle de Perse. (il est curieux que ces prophétesses, archi païennes et "récupérées" par les premiers Chrétiens  vers 340 soient aussi présentes à Venise, mais dans la Sixtine aussi il y en a 5 au plafond peintes par Michel-Ange). 

Sibylle de Lybie, fille de Zeus et de la nymphe Lamia fille de Poséidon. 

Sibylle de Delphes. 

Vue des chapelles de droite depuis le chœur. 

Vue des chapelles de gauche depuis le chœur. 

Troisième chapelle de gauche (Saint Sébastien), oeuvre de Baldassare Longhena. Les 4 portes sur les côtés sont un exemple précieux de mosaïque florentine. 

Au centre, la statue de Saint-Sébastien (musclé) en marbre de Carrare, est placée entre les colonnes de marbre à chapiteaux et bases de bronze. 

Les bustes de la famille Venier sur les parois,   Sebastiano à droite. 

A gauche, Angelo Venier, ils étaient les patrons  (mécènes) de la chapelle. 

Les trois plaques de bronze de l'autel (Bernardo Falconi) : martyre, glorification et dépôt du Saint. 

La chaire baroque hyper décorée aussi. 

Dans les panneaux, les quatre Evangélistes. 

Deuxième chapelle (de la Sainte Famille), (dite aussi chapelle Manin, le mécène), conçue par le même  Pozzo, le groupe sculpté  de H. Meyring. 

La Sainte famille tient sur un gros nuage et il y a aussi  le Soleil et la Lune. Sur les côtés, les deux remarquables chandeliers bleu turquoise en verre de Murano (mi-18ème siècle). 

L'archange Saint Michel à droite est de Giuseppe Torretti. 

A gauche, Saint Gabriel (Antonio Tarsia, ou Torretti ?). Giuseppe (ou Jacopo) Pozzo était un Carmélite architecte, sculpteur et peintre. 

Il a conçu le maître-autel de l’église des Gesuiti, à partir du dessin par le Bernin de l’autel de Saint-Pierre de Rome. 

La fresque du plafond est de Ludovico Dorigny. 

Ludovico Manin, dernier doge de Venise et déposé par Napoléon le 12 mai 1797, mort en 1802, a sa tombe ici. 

Première chapelle, dite  du Crucifié, financée par les familles Lumaga et Gussoni, les colonnes sont en marbre vert antique de Gênes, et la niche en cipollino grec. La croix est en marbre de jaspe. 

Sur la table sous la Croix (attribuée à GM Morlaiter) est placée une urne avec le Christ entre les deux larrons (Ecce Homo), en cire colorée, attribuée à des artisans du 17ème siècle. 

Bas-relief  représentant la chute du Christ au chemin de croix (Gian Maria Morlaiter). 

La voûte a été peinte à fresque en grisaille par Giambattista Tiepolo  en 1732 et représente le Christ au jardin de Gethsémani (les personnages colorés plus tard rendent très  difficile la vue du Christ au centre de la voûte). 

La contre façade. La tribune a été construite sur un plan de Giovanni Marchiori. A gauche de la porte il y avait la "Vierge Noire", rappelant Sainte Lucie. 

La statue fut achetée par les moines aux Chemins de Fer italiens qui l'avaient placée sur une colonne. Aujourd'hui elle est remplacée par une statue de bronze (Vierge Immaculée, Scarpa Bolla, 1959). 

Le balcon est orné de trois bas-reliefs représentant au centre la Madone du Carmel qui tend le scapulaire à Saint Simon Stock, à droite Sainte Thérèse et sur la gauche Saint Jean de la Croix. 

Au-dessus de l'orgue (originellement de Gaetano Callido, refaite par les Padouans Pugina vers 1900), une œuvre de Gregorio Lazzarini représentant l'apothéose de Sainte Thérèse couronnée par le Christ. 

Le plafond originel de Giambattista Tiepolo représentait le Transport de la Maison de Lorette (1743), mais il fut complètement détruit par une bombe autrichienne le 27 octobre 1915. 

Il fut refait par Ettore Tito entre 1929 et  1934.

Noter aussi les quatre cloches peintes sonnant à toute volée dans des trouées de ciel sur les quatre coins. 

A noter cette niche dédiée à une autre Thérèse, Ste Thérèse de Lisieux.

Partout dans l'église se trouvent en quantité (60 !) des pierres tombales, de nobles vénitiens, preuve de l'importance de cette église.

Elle illustre la proclamation de la maternité de la Vierge au concile d'Ephèse par Théodose II en 431.

Le dogme de l'Immaculée Conception, lui,  a été promulgué en 1859 par Pie IX (voir la salle dédiée au musée du Vatican).