Palais, Musées, Scuole à Venise

Palazzo Mocenigo (Santa Croce)

Musée du costume et du parfum

(Fait partie du Museum Pass)

Un bâtiment gothique existait déjà avant 1500, carré avec un patio au centre. Agrandi avec l'acquisition par les Mocenigo des immeubles adjacents, et restructuré au début du 17ème, il abrite depuis la branche "San Stae" des Mocenigo. Les façades externes (rio san Stae et la salizzada) possèdent des fenêtres en style palladien dites serliennes ou palladiennes (groupe de trois baies vitrées, la centrale couverte d'un arc en plein cintre, les 2 autres plus étroites et surmontées d'un linteau; très utilisé dans les bâtiments palladiens à Venise). Bon, ces façades, il faut se tordre le cou pour les voir …

Sebastiano Serlio est un grand architecte né en 1475, mort à Fontainebleau en 1554; il travaille à Rome, et ensuite à Venise de 1527 à 1540, puis en France sur plusieurs châteaux; il a quasiment inventé toute l'architecture de la Renaissance avec les portails à colonnades, les frontons triangulaires, les décorations de marbres, les escaliers d'honneur, les balustrades etc. Son traité d'architecture en 8 volumes a fait sa célébrité méritée et Andrea Palladio (1508-1580) l'a sûrement beaucoup utilisé y compris dans son propre traité en 4 volumes.


La famille Mocenigo a vécu ici jusqu'il y a peu de temps. Le mobilier et les fresques datent de la deuxième moitié du 18ème. Les salles sont décorées de tableaux, à la gloire des héros de la famille, le point d'orgue étant lorsqu'Alvise IV Mocenigo fut Doge de 1763 à 1778. En 1787, à l'occasion du mariage du neveu du Doge (défunt) avec Laura Corner (une autre illustrissime famille), on fit appel à Jacopo Guarana, Giambattista Canal et Giovanni Scajaro pour peindre les magnifiques fresques visibles aux plafonds des pièces. A noter aussi les portes en bois de bruyère et les corniches en bois sculptées et dorées.

Alvise Nicolo, dernier descendant, lègue en 1945 le palais Mocenigo di San Stae,à la Ville, pour en faire un musée d'art en complément du musée Correr. A la mort de sa femme dans années 60, la Ville reçoit aussi les pièces d'habitation du Piano Nobile (1er étage) du 18ème.

Finalement, après de nombreuses restaurations et agencements incluant des œuvres provenant d'ailleurs dans les 10 salles, le musée est ouvert en 1985 devenant le centre de l'Histoire des tissus et des costumes vénitiens (apportés ici des autres musées civiques), avec une importante bibliothèque spécialisée.

Le musée a été rénové et agrandi encore, pour rouvrir en 2013, avec 20 salles visitables au premier étage, avec une partie dédiée aux parfums (odeurs, fabrication, flacons précieux) très intéressante.

Sur la famille Mocenigo : même sans une mythologie inventée les faisant provenir d'Aquilée (berceau de la Vénétie avant les installations à Rivo Alto), les Mocenigo ont toujours joué des rôles très importants dans la République. Au-delà des 7 Doges élus (de Tommaso en 1414 à Alvise IV en 1763), ils furent des commerçants intrépides, et eurent des charges innombrables de Procurateurs, Ambassadeurs, Capitaine de la Mer ou de la Terre, Ecclésiastiques, ou Hommes de lettres. En particulier, Alvise I Mocenigo fut le Doge de la bataille de Lépante en 1570.

La branche principale habitait San Samuele avec rien que 3 Palazzi magnifiques donnant sur le Grand Canal, et au début du 17ème siècle, Nicolo, frère d'Alvise I, décida de s'installer ici.

Sur les photos : étant en principe interdites, elles ont été faites au vol, et dans des conditions d'éclairage souvent les pires possibles (contrejours, éclats de spots, étroitesse des lieux, etc.)

Adresse : Santa Croce 1992, 30135, Venezia

Horaires : 10:00-17:00

Site web : http://mocenigo.visitmuve.it/

(bien fait mais pas en français; des feuilles de présentations en français sont disponibles dans les salles)

rev2 08/12/2018


La façade du palais est très difficile à analyser, et son entrée presque confidentielle s'il n'y avait la pancarte. Bâti avant 1500, le palais est agrandi au 17ème siècle avec l’arrivée de la Branche « San Stae » de la famille Mocenigo. Les Mocenigo ont fourni 7 doges, mais pas seulement : ils furent de grands commerçants, des diplomates, des Procurateurs et Capitaines de la Mer, et aussi Ecclésiastiques ou hommes de lettres. Bref, LA famille noble vénitienne.

Les 2 façades sur le rio San Stae et la Salizzada ici sont typiquement palladiennes avec ces fenêtres serliennes (en 3 parties la centrale étant couverte d’une lunette semi-circulaire épousant l’arc en plein cintre). Le rez-de-chaussée est orné de nombreux bustes des grands Mocénigo.

Le Portego est la salle de réception, du piano nobile, en général luxueuse, donnant accès aux pièces des 2 côtés. Il est décoré des tableaux de Mocenigo illustres. Les grands tableaux sont les rois auprès desquels les Mocenigo furent les Ambassadeurs (ici peut-être Louis XIII).

La famille Mocenigo a vécu ici pendant plus de 300 ans, jusqu’il y a peu de temps.

Le palais a été légué à la Ville en 1945 par le dernier des Mocenigo, Alvise Nicolo.

En 2013, il rouvre avec 20 salles dont 8 dédiées aux parfums. 2 Doges sont représentés au-dessus des portes (les autres dans la frise sous le plafond très inspirée de celle de la Salle du Grand Conseil au Palais ducal).

Salle 1. Giovanni Alvise, ambassadeur (Paris, Rome, Lisbonne) et 118ème Doge sous le nom de Alvise IV Mocenigo, Doge de Venise (1763 à 1778) (Francesco Pavona, 1763).

Cortège de Pietro Mocenigo au Quirinal (même auteur).

Entrée de Pietro Mocenigo sur la piazza del Popolo (Antonio Joli, ca. 1681) (sur l'autre mur : portrait de la Dogaresse Pisana Corner, et un Gentilhomme).

Impressionnant cortège qui devait impressionner les invités au palais…

Salle 2 : meubles du 18ème d'ici, tableaux du musée Correr, soieries précieuses, porcelaine de Chine provenant du trésor de la Scuola Grande di San Rocco.

Judith et Holopherne (Ecole de Johan Liss, 17ème).

Minerve (Francesco Montebasso, ca 1769).

Rebecca et Lazare (Gregorio Lazzarini, 1690).

Allégorie au thème classique (anonyme romain, 18ème).

Pâris, (atelier de Piazzetta, 1730)

(non montrée ici, la fresque au plafond de Giovanni Scajaro, 1787).

Salle 3 : meubles du 18ème siècleet du palais, tableaux de Correr, verres de Murano et aussi "à la Bohème" biseautés et dorés. Tableaux (de d. à g.) : gentilhomme vénitien (anonyme vénète, 18ème), portrait de femme (idem), le Ridotto (atelier de Longhi, 1740).

Le Ridotto (atelier de Longhi, 1740).

Portrait de dame (Maria Molin, 1760), Goûter à la campagne (Atelier de Longhi 1740), Portrait d'homme (Giusepe Nogari, 1763).

Plafond : le fresque de Gianbattista Canal, allégorie de la famille, 1787, entouré d'un frise de stuc de Giovan Antonio Zanetti.

Salle 4 : Meubles du palais, et verreries du musée de Murano.

Les autres tableaux viennent d'ailleurs (œuvres mineures), ici un grand standard de la peinture : les trois états de la femme, remarquablement représenté par Domenico Maggiotto (ca 1762).

Mais ici, la Madone d'école Bellinienne du 16ème siècle fut commandée pour être placée à cet endroit même.

Au sol, les armoiries des Mocenigo.

Au plafond, une fresque de Jacopo Guarana (1787) : Allégorie nuptiale (Hymen descendant du ciel, la mariée au cœur transpercé, Amour, Poésie, Fertilité du Printemps), peinte pour le mariage du neveu du Doge (défunt) avec Laura Corner.

Salle 5 : au mur, l'arbre de la famille Corner (anonyme, 1709).

Portrait du Procurateur Giulio Contarini (Antonio Corradini, 1729). Voir aussi le chandelier (verre soufflé travaillé à la main, bouquets de fleurs polychromes du verrier Joseph Briati (17ème siècle).

(salle 6 fermée pour la journée): contient surtout des vêtements féminins du 18ème siècle (robes, jupes à paniers, corsages à larges manches et dentelles).

En face, la bataille de Sapienza (Grèce) contre de pirates, où Zaccaria Mocenigo, voyant la défaite imminente, mit le feu à son navire.

D'autres scènes marines ou de batailles.

Fresque de Jacopo Guarana, Apologie de la famille Mocenigo, 1787.

En traversant le portego, on arrive à la Salle 7 au remarquable plafond : au-dessus des portes, très jolies fresques aux allégories des 4 saisons (Gianbattista Canal, 1787), tableaux historiques des Mocenigo.

Arrivée à Chioggia du Prince de Suède reçu par le Doge Mocenigo (Antonio Storm, ca 1709).

Entrée à Constantinople de l'ambassadeur Alvise II Mocenigo (Antonio Storm, 1709).

Salle 8 : séries de costumes et robes, où on note que les hommes ont abandonné les modèles sévères des 16ème et 17ème siècles et empruntent de plus en plus les éléments féminins comme la dentelle, la broderie, les tissus légers.

Portraits de Patriciens, dont deux toiles carrées représentant les doges Morosini.

Console originale du palais et verres de Murano du Musée.

Les costumes sont représentatifs du luxe lequel les Grands de Venise s’habillaient (ça coûtait une fortune …), au point que le Sénat devait de temps en temps voter des lois pour limiter ces dépenses somptuaires qui faisaient des jaloux.

Salle 9 : Un des doges Mocenigo en pied (11ème), entouré à gauche de Grégoire XII et à droite du noble homme de lettres Marcantonio Michiel, et table couverte d'un velours ciselé du 16ème siècle.

Il y a plusieurs miroirs de ce type dans les salles, finement ornés de dorures précieuses. Poteries de Chine et verres du Musée de Murano.

Salle 10 : La table est couverte de 8 précieux tissus anciens et de fabrications complexes et différentes (je ne suis pas un spécialiste …), assiette du 16ème siècle, chandeliers du 18ème siècle. Au mur, Entrée à Vérone de Violante de Médicis (Antonio Storm, ca 1717) et un gentilhomme (1750).




Bal en l'honneur de Violante (Béatrice de Bavière, qui épousa Ferdinand de Médicis, et fut reçue par les Mocenigo).

Arrivée de la princesse sur une place de Vérone (Storm, 1717).




Salle 11 : l'habillement classique masculin, 50 gilets provenant du Fond Cini, très en vogue fin 17ème, descendant parfois au genou, avec des manches.

Le devant est en soie ou lin, il y a du coton derrière, cette tenue est restée très en vogue jusque fin 18ème (majorité des modèles exposés ici) où il devient alors plus court et sans manches.

Salle 12 : exposition de 205 ouvrages d'archives précieuses (petit spécimen de ce qui est conservé ailleurs dans le bâtiment, du 11ème au 20ème siècles), décrivant les familles et la société vénitienne dans ses détails quotidiens.

Très jolie salle qui donne une idée de la montagne de documents non encore exploités sur Venise. Avec cette salle se termine les œuvres des Mocenigo.

Commence la partie très récente et dédiée aux parfums. On y trouve plein d'instruments du 19ème siècle, une carte des routes utilisées par les Vénitiens pour aller chercher ces ingrédients rares et chers.

Salle 13 : vidéo de l'histoire vénitienne du parfum au moyen-âge. Salle 14 : laboratoire proche de celui d'un parfumeur (muschiere) au 14ème

Un herbier du 16ème siècle avec description des distillations à partir de végétaux ou de graisses animales rares. Tableau de l’incendie ravageur vers San Marcuola (en face du Canal) et parti des fours à verre présents à Venise ?

Salle 15 : matières et techniques de production, plateaux contenant divers ingrédients rares (musc des glandes de certains animaux, ambre gris (sécrétion intestinale du cachalot).

Autant dire que cela valait cher le kilo, et les galères vénitiennes revenant de Mer Noire étaient souvent attaquées par des pirates (Dalmates, Turcs, Grecs, ou même Chevaliers de Malte !).

Armoire à récipients.

Armoire à récipients.

Veduta.

Veduta.

Salle 17 : exposition de verres précieux (un triomphe du 18ème sous plexiglas), avec des flacons contenant des essences essentielles pour l'élaboration des parfums.


Les tableaux sont tous intéressants.

Salles 18 et 19 : mobilier du 18ème siècle.

Ne pas manquer d’admirer "l'orgue à parfums" en noyer, du 19ème siècle.