Guide en images des églises de Venise

San Pietro Martire (Murano)

Murano fut peuplée comme les autres îles de la lagune : les invasions à répétition des Barbares dévastèrent cette région de grand passage, depuis le 2ème jusqu'au 8ème siècle. Un raz-de-marée vers le 5ème (date non prouvée) détruit et modifie totalement toute la lagune et les fleuves se jetant dans l'Adriatique, bouleversant l'hydrographie. En 452, c'est Attila qui détruit Aquilée et entraîne une émigration massive dans les îles de la lagune. En 486 nouvelles invasions avec Théodoric, puis avec les Lombards du roi Albouin en 560 (puis encore en 639), avec des flots de réfugiés emmenant tous leurs biens (jusqu'aux pierres de leurs maisons ou leurs églises). 

Les Vénètes durent se résoudre à quitter la "Terre Ferme" pour ces îles insalubres mais où les marais, les hauts fonds les protégeaient suffisamment. D'où des migrations complètes de villages sur Torcello, Rivo Alto et Murano entre autres. Les réfugiés d'Altinum arrivés sur Murano l'appelèrent Amurianum, du nom d'une des portes de leur ancienne ville de résidence. Murano a longtemps vécu des salines et de la pêche, puis du commerce maritime avec l'Istrie et le Frioul (bois, fer).

Histoire

L'église de San Pietro est construite en 1363 grâce au legs en 1348 du Patricien Marco Michiel (dont l'urne funéraire est la première à gauche du portail de l'église Zanipolo à Venise (San Giovanni e Paolo) et dont la famille millénaire a donné trois Doges), en même temps qu'un couvent dominicain, et dédiée à Saint Jean-Baptiste et Marie-Madeleine. 

Comme beaucoup d'autres, elle est consacrée seulement plus tard en 1417, mais (comme beaucoup d'autres aussi) elle est détruite par un incendie en 1474, on la reconstruit entièrement, et elle prend son aspect actuel, en style Renaissance classique, en 1511. Du coup l'église fut consacrée non plus à St Jean mais à Saint Pierre martyr. 

Comme d'habitude, Napoléon passe par là et la ferme en 1806, le monastère attenant est occupé par l'armée (tous les Dominicains furent concentrés à Zanipolo), puis transformé en école. Elle est rouverte en 1813 sous le nom de Saint Pierre et Saint Paul, et redevient dédiée à Saint Pierre Martyr mais seulement en 1840, date à laquelle le couvent est partiellement détruit pour servir d'école primaire puis de centre de formation en verrerie et ensuite d'annexe postale.  

L'église a été restaurée à partir de 1922, et a permis de dévoiler le toit en bois en forme de coque inversée ainsi que les fresques au-dessus des piliers à l'intérieur.

Extérieur

De l'extérieur, on voit une grande église Renaissance toute en briques avec les ouvertures (portes, fenêtres au rez-de chaussée, oculi ronds de chaque côté de la nef centrale, et rosace sur la façade) encadrées de pierre d'Istrie. La façade et le corps de l'église soulignent les trois nefs de hauteurs différentes. 

Le portail principal de la façade est du 16ème siècle avec de beaux pilastres palladiens ornés et des colonnes Renaissance. Une plaque de marbre fait référence au financeur Marco Michiel. Après le corps de l'église on peut voir la grande cour du monastère. Sur le flanc gauche de l'église est adossé un couloir couvert avec une belle colonnade (provenant d'un couvent démoli dédié à Santa Chiara et placé ici en 1924 lors de la restauration).

Le campanile (1502) est collé à l'édifice à gauche de la nef. 

Intérieur

L'intérieur est de type basilical, à trois nefs avec de grandes colonnes de marbre rejointes par 6 grands arcs en plein cintre richement ornés entre lesquels des "images" de saints avec leurs attributs sont finement peintes. Des renforts de poutres en bois traversent la nef principale et les arcs latéraux pour solidifier l'édifice. Le chœur, plus bas, est entouré de deux chapelles étroites, et les murs latéraux sont ornés de six autels mineurs.

Hormis quelques œuvres intéressantes, l'église offre un aspect plutôt hétéroclite malgré son ambiance claire et propre et en effet les œuvres d'art de l'église et du monastère furent emportés, comme près de 20 autres églises de Murano fermées par Napoléon vers 1806, soit en France soit à l'Accademia, et ce que l'on voit provient majoritairement d'ailleurs (de Murano et d'autres îles). 

A voir aussi la sacristie (petit musée religieux local) où l'on a placé en 1815 les boiseries des stalles de la Scuola de San Giovanni dei Battuti (un ordre de Flagellants) démolie au début du siècle et constituées de magnifiques sculptures de Pietro Morandi. Au-dessus des stalles, on a installé des peintures venant aussi de la Scuola.

Sur Saint Pierre Martyr

Il s'agit de Pierre de Vérone, né en 1205 à Vérone, devenu catholique très tôt malgré des parents Cathares. Il rentre chez les Frères Dominicains à Bologne, lutte contre le Catharisme et fonde un monastère à Milan. Il en est nommé Inquisiteur par le Pape Innocent IV en 1251 et convertit beaucoup d'hérétiques cathares.

En  1252 il est poignardé (ou tué à coup de serpe sur la tête) sur une route (son meurtrier, de remords, entra chez les Dominicains pour expier). On le représente avec son crâne tonsuré de Dominicain mais fendu par une hache ou une serpe (de nombreux tableaux le montrent soit avec le crâne fendu soit même avec une hache ou une serpe plantée dans sa tête). Sa statue se trouve aussi sur un des pinacles de la façade de Zanipolo.

Adresse : Fondamenta dei Vetrai, Murano

Horaires : Lun-Ven 09:00-18:00 Sam 12:00-18:00 (autre source : Lun-Sam 9-12 15-18 et Dim 15-18)

Crédits pour cette version incomplète (photos perdues) qui sera mise à jour dès que possible: merci à Alain Geslin pour la sacristie (http://promenadesvenitiennes.alaingeslin.fr/crbst_849.html), 

Google Earth pour la vue d'avion. La contre-façade vue du chœur est d'origine www.all-free-photos.com

rev4 30/11/2023

Vue Google Earth de l'église au bout de la Fondamenta dei Vetrai,  avec ses trois nefs, sa façade et son campanile. 

Vue depuis le grand canal traversant l'île de Murano. Financée par Marco Michiel en 1348, elle est consacrée en 1417. Incendiée en 1474, elle est entièrement reconstruite en style Renaissance en 1511.

Haute façade, avec les bas-côtés dessinant les nefs latérales, et un joli portail en pierre d'Istrie. De Saint Jean l'église passe alors sous le patronage de Saint Pierre et Saint Paul. 

Cette plaque référence le donateur fondateur Michiel (grande lignée de Patriciens et de Doges). L'église change de patron pou Saint Pierre Martyr en 1840.Cette plaque référence le donateur fondateur Michiel (grande lignée de Patriciens et de Doges). L'église change de patron pour Saint Pierre Martyr en 1840. 

A gauche, le monastère dominicain. Les arcades proviennent du couvent de Santa Chiara, déplacées ici en 1924 lors de la restauration (réussie). 

Le campanile de 1502 est accolé à l'abside. Le monastère fut comme l'église fermé en 1806, et servit de bâtiment militaire, d'école, et même d'agence postale. 

Les trois nefs séparées par de belles colonnes et les 6 arches en plein cintre en font une église spacieuse. 

Le plafond en bois, et les traverses en bois pour consolider le bâtiment. 

Au-dessus des colonnes et dans les frises, ces images de Saints très anciennes, ici Catherine de Sienne.

Le plafond comme les peintures et frises décorant les arcades ont été retrouvés après la restauration de 1922-1926. (Saint Thomas). 

Jordan de Saxe.  

Albert le Grand.

Albert de Bourgogne.

Raymond de Barch (visite par la droite).

San Nicola, Santa Lucia e Santo Carlo Borromeo (Charles Borromée), Giacomo (Palma le Jeune) (vient de l'église Saint Blaise sur la Giudecca). 

A côté, un petit tableau avec Saint Marc présentant le Doge Agostino Barbarigo à la Vierge à l'Enfant et Saint Augustin Giovanni Bellini (1488). 

Il a été transféré en 1501 par le Doge, du Palais des Doges à Santa Maria degli Angeli où 2 de ses filles étaient nonnes, et apporté ici en 1815. (appelé aussi la "pala Barbarigo"). 

Baptême du Christ, attribué au Tintoret, qui vient du maître-autel de l'église démolie San Giovanni dei Battuti. 

La sacristie et d'autres œuvres proviennent également de cette église appartenant au Battuti (Flagellants).

Chapelle absidiale de droite dite des  Ballarin, dédiée à Giuseppe et Maria. Le verrier Gorgio Ballarin la fit faire pour sa famille, il y est enterré en 1506. 

Son célèbre descendant Giovanni Battista (Chancelier de Venise mort en 1666 en Macédoine) et son fils Domenico Grand Chancelier aussi, mort en 1698. 

Très belle icône dans le tabernacle. 

Le chœur est modeste et de taille réduite, avec une simple voûte en berceau, et avec comme ailleurs dans l'église de magnifiques lustres de Murano. Statues de Saint Pierre et de Saint Paul. 

A gauche, grand tableau de Bartolomeo Letterini (peintre vénitien célèbre du début du 18ème), la Multiplication des pains et des poissons (1721). 

En arrière-plan, le lac et la forteresse de Tibériade, les Apôtres distribuant les nourritures. Letterini a aussi peint les tableaux derrière le maître-autel entre les fenêtres.

A droite, du même Letterini, les Noces de Cana en Galilée, on peut y voir les costumes d'époque, les saltimbanques. 

Les inévitables chiens, et beaucoup de luxe, de vaisselle et de victuailles. 

On voit très mal à côté des fenêtres les peintures de Letterini (Guérison de l'aveugle, du sourd-muet, le Centurion, Résurrection de Lazare). 

Chapelle gauche du  Saint Sacrement, autel lombard avec un bas-relief Ecce Homo de 1495 (qui proviendrait de l'église San Stefano en ruines). 

A gauche, Déposition de la Croix (Marco Angelo dal Moro), à droite la Vierge à l'enfant (Bernardino Licinio, mi 16ème siècle). 

Saint Augustin piétine l'Hérésie (Gregorio Lazzarini)

A droite, Saint Marc guérit Sant' Aniano (Le Tintoret). 

(voir aussi le même sujet par Giovanni Mansueti à l'Accademia, et la façade de la Scuola dei Calegheri au campo San Toma). 

Saint Joseph et des Prophètes (Giovanni Contarini, ca 1580 ?). 

Saint Marc et Saint Anien (détail). Anianus (Saint Anien en français) est l'évêque ayant succédé à Marc (choisi par lui) à Alexandrie après 62. Il était cordonnier et donc le patron des "Calegheri" (cordonniers).

Porte de la sacristie (musée diocésain), où sont rangées des œuvres qui ont échappé à Napoléon lors de son invasion de Venise. 

Au-dessus de la porte, Saint Jérôme (Girolamo) dans le désert, de  Paolo Caliari (Le Véronèse) rapporté de Santa Maria degli Angeli pas loin. 

La sacristie (musée diocésain). Les boiseries baroques de 1652-1666 et les peintures de la Scuola dei Battuti, sauvegardées en 1815. (les 2 photos au crédit d'Alain Geslin, un des seuls à avoir ces images. Bravo, merci) 

Il y a 33 bustes sculptés (dans les postures ça rappelle de loin celles de la Scuola San Rocco), et entre eux les panneaux des stalles en bois illustrent la vie de Jean-Baptiste. 

La visite de Pierre dans la prison de Saint Agathe (San'Agata visitata da San Pietro), Le Véronèse. 

La Déposition (descente de la Croix), par Giuseppe Porta (Il Salviati, mi-16ème ?).

 Le Christ prend dans les bras Ignace de Loyola (Gregorio Lazzarini).

Dernier autel de la nef gauche près de la porte (pas d'info), jolis médaillons (voir le site d'Alain Geslin). 

Vierge à l'enfant. 

Contre-façade vu du chœur.