Guide en images des églises de Venise

Cappella del Volto Santo (Cannaregio)

Histoire

La guerre entre Guelfes (favorables au Pape) et Gibelins (favorables à l’Empereur) à partir de 1309 puis 1314 et 1317 en Italie fit fuir la population de Lucques (on parle de plus de 400 familles, en majorité nobles et riches), et Venise, neutre comme toujours, les accueillit (moyennant finances …). Les Lucquois, experts dans le traitement de la soie s’installent autour de la Cale della Bissa, et en 1360 obtiennent la permission de construire, contre l’église des Servites existante, une chapelle pour leur Scuola dont la Saint Face (Volto Santo) est la patronne. Santa Maria dei Servi était une des trois églises les plus importantes de Venise avec les Frari et San Giovanni e Paolo. Elle faisait partie du complexe conventuel fondé par l'Ordre des Servites de Marie (un ordre mendiant créé en 1223 par sept Toscans). Les Lucquois définissent avec le Conseil des 10 une « mariegola », ensemble de règles laïques ou charte de la Confrérie, à respecter. En 1365 la Scuola est dissoute pour non obéissance aux règles du Conseil vénitien, mais se recrée un peu plus tard et connait un grand succès.

En 1370 la chapelle est achevée et les Lucquois de Venise s’y retrouvent pour leurs messes et leurs œuvres caritatives. La chapelle est consacrée en 1376 par l’évêque de Jesolo, Pietro Natal.

En 1789, un incendie détruit une soixantaine de bâtiments, parmi lesquels la Scuola et les 10 maisons louées aux pauvres sont également détruites. Toutefois, grâce à la contribution concrète offerte par le Doge et les patriciens Corner et Contarini, la reconstruction a pu être achevée en 1799. Deux pierres tombales sur la façade de la Scuola rappellent l'épisode.

En 1820 on assiste à la démolition presque totale de la magnifique église des Servites et le monastère des Pères Servites, il ne reste que la chapelle debout.

La chapelle de la Sainte-Face, sauvée des démolitions du grand complexe des Servites, est d'abord devenue un entrepôt.

En 1859, la chapelle est achetée par l'abbé Daniele Canal (d’où le nom du rio qui la borde) et Anna Maria Marovich, car c'était la petite église de leur institut pour la récupération des femmes qui sortaient de prison. Dans les années 1980, à la suite de la fermeture de l’Istituto Marovich, une maison des étudiants de Santa Fosca a été créée, qui gère toujours la chapelle.

Extérieur

Très quelconque puisque l’église des Servites fut détruite et on ne voit de la chapelle que sa face arrière qui était adossée à l’église. Pour une chapelle, elle est très haute et imposante par son flanc donnant sur le rio Canal.

Intérieur

L’intérieur a été bouleversé avec le temps et de nombreuses œuvres ont disparu ou ont été transférées ailleurs. Il y avait deux peintures avec des histoires de la Sainte Face, de Pietro Ricci, un peintre de Lucques du XVIIe siècle, un disciple de Reni. Ricci fait également l'autel gothique en bois doré. Les quatre Evangélistes, œuvres de Girolamo da Santacroce, furent envoyés en 1814 aux Galeries de l’Accademia. les Saints Ambroise et Jérôme ont été donnés en dépôt à l'église Madonna dell'Orto, tandis que ceux portant l'image de Saint-Jean et Saint-Marc à Sant'Elena.

En dépit des déprédations du XIXe siècle, la chapelle conserve encore le magnifique plafond d'origine avec des images des Pères de l'Église et les symboles des quatre Evangélistes, probablement l'œuvre du peintre vénitien Nicolò Semitecolo (seconde moitié du 14ème siècle). L’autel central est magnifique ainsi que les mosaïques sur les portes, mais l’ensemble est bien nu et pauvre en tableaux. Cette chapelle mérite tout de même une visite si on se trouve près de Santa Fosca ou du ghetto.


Il Volto Santo (la Sainte Face)

La Sainte Face est un crucifix portant le visage du Christ, de 2,4 par 2,6m, mais son origine fait l'objet de plusieurs versions (incompatibles). Selon les uns, il aurait été réalisé par Nicodème, un des présents à la Descente de la Croix du Christ, placé dans un bateau sans personne à bord, et dérivant dans la mer jusqu’en Italie au port de Luna.

La légende dit que le crucifix arriva sur la plage et un ange prévint l’évêque Giovanni qu’il y trouverait une sculpture importante portant le vrai visage de Jésus Christ, et l’évêque le rapporta dans la cathédrale en grandes pompes en 742 avec la vénération qu’il convient. Selon d’autres, ce crucifix n’aurait pas été fabriqué de la main de l’homme mais trouvé après la Déposition du Christ mort. Il serait conservé à la cathédrale Saint Martin de Lucques.

Dante cite le Volto Santo dans l’Enfer, chant XXII.

Une copie est conservée au Musée du Séminaire patriarcal.


Adresse : Fondamenta Daniele Canal, Cannaregio 2372 (Centro di Pastorale Universitaria Santa Fosca)

Horaires : le mieux est de vous présenter à la réception (entrer par le portail, puis couloir à droite, la réception se situe sur la gauche et la chapelle tout de suite après).

Références

http://www.veneziamuseo.it/terra/cannaregio/marcuola/mar_sn_lucchesi.htm

(Meilleure source : Venise Insolite et Secrète, Thomas Jonglez et Paola Zoffoli, Editions Jonglez, page 231)

Rev3 07/11/2019

On arrive à la chapelle par le rio Canal, depuis Santa Fosca (avant d’arriver à la porte sur le quai, aller à droite dans le campo Diedo voir le magnifique lion ailé au-dessus de la porte dans la ruelle).

L’arrière de la chapelle, construite en 1376 (lésènes hautes et gros oculus).

Entrée du domaine des Servites de Marie (ancien monastère et jardin de l’Ordre), aujourd’hui espèce d’auberge de jeunesse pour étudiants étrangers. Les habitants de Lucca avaient fui la guerre entre Guelfes et Gibelins en 1317.

Ils étaient experts dans le travail de la soie (et Venise bien sûr les a accueillis, moyennant finances aussi). La chapelle est très haute pour ses dimensions au sol. Les fenêtres à droite donnent sur le rio Canal au sud.

Le plafond est d’origine, il a été peint dans la seconde moitié du 14ème siècle.

On y voit les attributs des 4 Evangélistes (aigle, lion, homme ailé, taureau).

Magnifique autel en bois doré (Pietro Ricci) avec les 4 panneaux du Tétramorphe qu'on retrouve au plafond.

Les Lucquois fuyant la guerre entre Guelfes et Gibelins étaient maîtres dans le travail de la soie (filature, tissage et teinture).

Du coup Venise au grand cœur les a accueillis avec un grand intérêt …

Et il est vrai qu’ils ont apporté avec eux des richesses incroyables avec leur art.

Les marchands de soie se trouvaient Calle della Bissa, les teinturiers vers San Giovanni Crisostomo.

Les tisserands étaient à Biri (pas loin des Miracoli et du palais Widmann).

Ces Lucquois formaient une vraie Compagnie, édifiaient des maisons d’accueil pour les pauvres (10 en 1388 qui furent détruites par un incendie en 1789).

Les tisserands étaient à Biri (pas loin des Miracoli et du palais Widmann).