Guide en images des églises de Venise

Santa Maria Assunta (i Gesuiti ) (Cannaregio)

Histoire

Vers 1155 les Crociferi (un Ordre dédié aux malades et aux hôpitaux) bâtissent une église et un monastère à cet endroit, dédiés à l’Assomption. Incendiée (comme tant d’autres en 1214, l'église est reconstruite. Au 15ème siècle, les Crociferi mènent une vie dissolue et le Pape les excommunie et les expulse pour y mettre des Franciscains, puis des Servites. En 1514 un nouvel incendie ravage le site et l’église est reconstruite, et, surprise, redonnée aux Crociferi à la fin du siècle. Ceux-ci reprennent leurs mauvaises habitudes et ils sont de nouveau bannis partout par Innocent X, excepté ici on ne sait pourquoi, mais Alexandre VII termine le boulot en 1656 où ils disparaissent définitivement. Le Pape fait cadeau des lieux à la ville de Venise pour aider à la guerre de Candie. En 1657 un an plus tard, l’église et les alentours sont « achetés » pour 50000 ducats par les Jésuites d'Ignace de Loyola (ordonné prêtre à Venise en 1537).

Pour l'Histoire, les Jésuites avaient commencé leur évangélisation à Venise mais se mirent au service du Pape à Rome en 1538. Ils restent très influents à Venise, en particulier dans l'enseignement, la confession, et les legs douteux à l'Ordre par des gens sous leur coupe. Après que le Pape Paul V Borghese, soutenu par les Jésuites, eut excommunié tout Venise en 1606, la Sérénissime les expulse brutalement.

Ils ne reviendront qu'en 1657 pour y créer une toute nouvelle église, celle que l’on voit maintenant.

La reconstruction de l'église en baroque (extrême) grâce à la famille Manin (qui y a sa tombe) est commencée en 1715 par Domenico Rossi et se termine en 1729. En 1773, l'ordre des Jésuites est supprimé, le couvent devient école puis caserne. Pie VII rétablit les Jésuites en 1814.


L’extérieur

C’est Domenico Rossi qui dessina l’église en 1715, après avoir détruit entièrement l’existant (sauf le campanile datant des Crociferi, qui fut modifié pour y loger l’étage des cloches au 18ème siècle).

La façade, à deux niveaux, de G.B. Fattoretto contient le symbole des Jésuites (IHS entouré de deux anges). Le premier niveau est formé de 8 colonnes surmontées de 8 statues des Apôtres. Quatre niches sur les côtés renferment les statues des 4 Apôtres restants : Saint Jacques le Majeur, Saint Pierre, Saint Paul et Saint Matthieu l'Évangéliste. Le second niveau est moins haut mais richement décoré (très baroque), son tympan triangulaire est surmonté de statues, avec au sommet une belle Assomption (l'église s'appelle aussi Santa Maria Assunta) par Giuseppe Torretti.

L’intérieur

L'intérieur est « classique Jésuite », en croix latine allongée avec 6 chapelles et un chœur en trois parties flanquée de 2 chapelles latérales. A noter la complexité du transept, avec deux orgues, et des monuments grandioses. Mais le plus frappant est certainement l’utilisation, dans toute l’église de marbres polychromes et découpés en marqueteries d’une finesse absolument incroyable (même le baldaquin de la chaire, sur le côté gauche, est une draperie de marbre ocre, et les marches d’escalier montant vers le maître-autel sont en marbre, et recouvertes d’un soit disant tapis épais qui est en fait encore du marbre). Pour cette raison, i Gesuiti sont vraiment une église absolument unique à Venise par ce luxe de marbres (tous les murs sont en marqueteries de marbres de deux couleurs blanc et vert).

Le chœur mérite aussi notre admiration par la complexité et le luxe de son architecture, avec un baldaquin entourant un tabernacle majestueux, surmonté d’un globe incroyable de finesse et de précision. Le plafond est également à admirer avec des stucs et des fresques immenses et très fines. La sacristie renferme 20 tableaux de Palma le Jeune et un plafond magnifique.

Palma le Jeune a peint dans la sacristie et l'oratoire, sous forme de bande dessinée en 20 tableaux de grande taille, l’histoire de la création des Crociferi (ordre des Porte-Croix).

Tout est différent de ce qu’on voit d’habitude à Venise. Tout est grandiose, luxueux à l’extrême. Et en plus l’ensemble est parfaitement tenu.


Sur Hélène et la Vraie Croix (Palma le Jeune 1593)

Hélène, chrétienne, mère de l'Empereur Constantin, retrouve la Vraie Croix du Christ en 326 lors d'un pèlerinage à Jérusalem en ruines (ou lors de l'inspection des futurs travaux de la basilique) : lors de fouilles préparatoires, un ouvrier découvre une citerne au fond de laquelle se trouvent trois croix dont l'une porte l'inscription : Iesus Nazarenus Rex Judeorum (INRI) (on dit aussi que ce fut la seule croix à guérir une mourante, donc la bonne). Cette légende se retrouve ailleurs dans Venise, et, entre autres auteurs : Sebastiano Ricci à San Rocco, le Guercino à San Lazzaro dei Mendicanti, Pietro Liberi à San Moïsé, Santa Maria Mater Domini, JB Zelotti à Sant'Angelo Raffaele, en statue à San Marcuola, Francesco Solimena à San Pietro di Castello, Gianbattista Cima à San Giovanni in Bragora, et des centaines d'autres exemplaires ailleurs sans doute.

Adresse : Campo dei Gesuiti Cannaregio 4885

Horaires : Lun-Sam 10.00-12.00 15.00-19.00 (ou 15:30-17:30, ou 16:00-18:00)

rev3 05/12/2019

Vers 1150, les Crociferi bâtissent ici une église (Santa Maria Assunta, dite aussi plus tard I Gesuiti), un hôpital et un monastère. Ils sont expulsés pour mœurs dissolues, et l’église est confiée aux Franciscains. Reconstruite en 1514 après un incendie, elle est redonnée aux Crociferi en 1585.

Le pape Innocent X les bannit de nouveau. Et le Pape Alexandre VII vend le tout à la ville en 1656 (pour aider à financer la guerre de Candie (Crète). Et Venise la revend en 1657 pour 50000 ducats aux Jésuites expulsés eux aussi en 1606 suite au gros conflit avec Paul V et de retour cette année-là.

L’église actuelle date de 1715 (Domenico Rossi, qui avait déjà fait San Stae), elle est archi baroque et totalement en ligne avec l’esprit jésuite qui aime le luxe pour impressionner les paroissiens et les pèlerins.

Au premier niveau, 8 colonnes surmontées de statues de 8 Apôtres, au sommet du tympan des anges et la Vierge de l’Assomption.

LES NICHES

Dans les niches les 4 Apôtres restants, Saint Jean (épée) et Saint Matthieu (homme-ange).

Saint Jacques le Majeur (pèlerin) et Saint Pierre (clés).

L'intérieur frappe par la magnificence des décors de marbre blanc et vert. 3 chapelles latérales de chaque côté et un chœur en 3 parties comme le veut la tradition jésuite.

Tous les murs sont décorés de marbres de deux couleurs (blanc et vert) comme des marqueteries. Plafond à fresques de Francesco Fontebasso et stucs d'Abbondio Stazio.

Abraham adorant les trois Anges (Fontebasso, 1734).

La vision de St Jean L'Evangéliste (Francesco Fontebasso).

Visite par la droite.

Première chapelle de droite : Les anges gardiens, (Palma le Jeune 1619), de la Scuola degli Samiteri (Tisserands de soie et or).

Chapelle de Santa Barbara, (GM Morlaiter), attribuée à la Scuola degli Sartori (tailleurs).

Marie et les trois Jésuites (Antonio Balestra). Sont représentés Louis de Gonzague (bien connu ici), Francesco Borgia, Stanislas Kostka.

Transept droit, un orgue (ne marche plus).

Chapelle d’Ignace de Loyola (Pietro Barrata, 18ème).

Monument à Orazio Farnèse (fin 17ème)

Chapelle latérale droite, La prédication de Saint François Xavier, (Pietro Liberi, 17ème).

Le maître-autel (Giuseppe Pozzo), dédié à la Sainte Trinité, avec un immense baldaquin de dix colonnes torsadées de marbre vert portant une coupole blanche. De chaque côté, les archanges Barachiel et Uriel (G Torretti).

Dans la voûte du chœur, le triomphe du nom de Jésus (Louis Dorigny, 1732).

Au-dessus du tabernacle magnifique de Giuseppe Pozzo, ce globe où le Christ est assis avec le Père avec une inscription (Uficit Sola Fide).

Le sol est extraordinaire, et les escaliers en marbre brun font penser de loin à de riches tapis brodés. C’est unique à Venise, pas un m2 n’est laissé brut ou sans marqueterie.

Noter le « surtapis », aussi en marbre, sur les marches diagonales.

Au-dessus de l’autel, les anges musiciens en gloire (Louis Dorigny, 1720).

Chapelle latérale gauche : la mort de Joseph (Domenico Clavarino).

Au-dessus de la porte de la sacristie, le monument au Doge Pasquale Cigogna (Girolamo Campagna, 1602), supporter des Crociferi à la fin du 16ème siècle.

Autel de l’Assomption de Marie (toujours transept gauche) (Le Tintoret).

L’orgue de gauche symétrique à l’autre dans le transept.

Aux 4 coins de la croisée, les statues des archanges : ici Raphaël (avec Tobie).

Là, Saint Michel (il y a aussi Gabriel et Sariel). (Giuseppe Torretti).

La sacristie est un trésor de 20 tableaux de Palma le Jeune, faits entre 1589 et1625, qui a entre autres écrit l’histoire des Crociferi (pourtant tumultueuse et pas vraiment exemplaire) et l’histoire de la Vraie Croix retrouvée par Sainte Hélène.

Sainte Hélène et la Vraie Croix (1593) (voir l'introduction)

La découverte de la Vraie Croix.

Au-dessus la porte, la décollation de Saint Jean Baptiste, entre Saint Lanfranc et Saint Libère, 1610

L'empereur Héraclée rapporte la Vraie Croix au Calvaire.

Le pape Anacletus (1593).

A droite Alexandre III confirme la Règle des Crociferi.

Et à gauche, Pie II en réforme la Constitution.

Gauche de l’autel : à droite, le Pape San Cleto (Anacletus) fonde l'Ordre des Crociferi et à gauche : l'évêque de Saint-Cyrille de Jérusalem confirme l'Ordre. (1620 1622) .

San Cleto Anacleto (Anacletus), troisième pape après Pierre et Lino, de 79 à 90 apjc.

Chapelle de la Vierge Marie. Vierge à l'Enfant en gloire avec les Saints Lucie, Catherine, Antoine l'Abbé et le Pape Anacleto.

Le serpent de bronze (d’airain) (1592 ou 94). En fuite, les Juifs étaient mordus par des Serpents, Dieu dit à moïse : "Mets un serpent au bout d’une croix et vous survivrez".

Comme on le voit c’est le chaos malgré les vêtements superbes des migrants.

Le pape Anacleto (1592).

Le plafond est aussi richement décoré.

David reçoit d’Achimelec le pain dans le sanctuaire.

La chute de la Manne (1590).

Elie nourri par l’Ange.

Autour, les Evangélistes en grisailles.

Flanc gauche de la nef.

Chapelle du Sacré Cœur.

Le Sacré-Coeur de Jésus (Alessandro Revera, mi-19ème siècle).

Tous les murs jusqu’en haut sont faits de ces décors bicolores en marbre brillant blanc et vert. La chaire renferme un baldaquin lui aussi en marbre ocre, qui imite une tenture de velours, l’effet est saisissant.

(Francesco Bonazza)

Chapelle de la Vierge, avec une statue datant de l’ancienne église des Crociferi (Andrea dell’Acquila).

On se demande comment ont pu être réalisées ces centaines de mètres carrés de plaques de marbre aussi parfaites.

Chapelle de Saint Laurent (qui grille) (Le Titien, 1557).

La contre-façade est aussi impressionnante avec des monuments à la famille Da Lezze (Jacopo Sansovino, mi 16ème), avec 3 sarcophages des nobles de cette famille patricienne.

Au centre le buste d’Alessandro Vittoria.


Juste à côté sur le campo, l'oratoire des Crociferi.

Vu du vaporetto par l’arrière on voit que les Vénitiens savaient faire les façades mais n’avaient plus d’argent pour le reste des murs. (le verbe paraître n’a jamais été aussi bien défini qu’ici) .

La corniche des statues de marbre tenues par des tiges de métal (ne se voient pas du bas non plus …).