Guide en images des églises de Venise

Ognissanti (Dorsoduro)

Histoire

Fondée dès le 15ème siècle par des religieuses cisterciennes du couvent de Santa Margherita de Torcello venues s'installer sans ce quartier de Baseggio ici parce que l'île était devenue insalubre.

Ce couvent  de Santa Margherita fut créé dès 1239. D'autres couvents et monastères cisterciens (San Matteo di Borgognoni en 1206, San Maffio, San Antonio Abate, etc) occupaient Torcello ou Mazzorbo, avec parfois des conflits sur les règles (cistercienne ou bénédictine), ou sur la prédominance par une hiérarchie située ailleurs. Torcello comme d'autres îles de la lagune, devient insalubre avec les ensablements de la lagune et les épidémies (paludisme, peste, malaria …). De plus, avec le développement de Venise, son port et son commerce, très importants au 11ème siècle, périclitent et disparaissent au 14-15ème siècle.

Comme beaucoup d'autres, les religieuses déménagent donc à Venise en emportant avec elles leurs biens et leurs propres tableaux, parmi lesquels celui de Palma Giovane. Elles ont probablement occupé au départ une maison existante, puis un couvent sommaire, et font construire à côté du couvent une petite église en bois en 1472, dédiée à La Vierge Marie et tous les Saints, visible sur le plan 3D de Jacopo di Barbari en 1500. Leurs finances se seraient améliorées après avoir acquis une image miraculeuse de la Vierge. La fondation religieuse fut approuvée par le Pape Alexandre VI en 1494, celui-ci remplaçant la règle cistercienne par celle de Saint Benoit.

L'église fut reconstruite, agrandie de 1505 à 1520 (mais pas terminée)  en même temps que le couvent en pierre que l'on voit aujourd'hui. Les bénédictins d'Ognissanti furent appelés à réformer d'autres monastères du même ordre; en 1519 quatorze d'entre eux passèrent dans celui des Saints Biagio et Cataldo à la Giudecca sur instigation du pape. L'église est consacrée seulement en 1586. La lenteur des travaux était probablement due à la pauvreté des sœurs.

L'église et le monastère ont été supprimés par Napoléon en 1806, dépouillés de leur contenu, et laissés à l'abandon. On sait qu'en 1820 on y trouve une école de filles, puis plus tard, avec l'intervention de Giovanni Battista Giustiniani, la structure est adaptée à la prise en charge des personnes âgées et devient maison de retraite. L'église est incorporée dans l'enceinte de l’hôpital, puis restaurée pour le culte des patients. La communauté religieuse fut remplacée par des Frères mineurs capucins venant de Castello (Venise).

L'ensemble devient ensuite un hôpital jusqu'au milieu des années 1990. Il appartient aujourd'hui à l'université Ca'Foscari et accueille souvent des étudiants non-vénitiens.

Extérieur

La façade, très développée en hauteur, est divisée verticalement en trois, selon le schéma à trois nefs, le porche d'entrée est décoré de divers éléments sculptés discrets. L'église est flanquée sur le côté gauche de son campanile, coiffé d'un bulbe baroque en feuilles de plomb 

Intérieur

L’intérieur possède une nef unique, avec deux autels sur chaque côté. Noter que tous les autels, initialement en bois, ont été détruits et remplacés en 1738 par des autels en marbre de style baroque, similaires (vétusté du bois probablement dû à l'humidité). Le chœur est flanqué de deux chapelles symétriques magnifiquement décorées. La décoration des murs de la nef est minimaliste et contraste avec la richesse des fresques du chœur. Sur la contre-façade un grand Barco (galerie réservée aux religieuses) permettait aux nonnes de suivre l'office derrière des grilles comme dans d'autres églises de Venise (San Zaccatia, Miracoli, etc).

Le plafond de la nef, à caissons, est très sobre avec seulement un motif sculpté et peint dans le caisson central.

Les fresques du choeur furent commandées le 13 mars 1673 par Agostino Litterini, aidé par Giacomo Grassi, de Bologne (ici les sources sont floues sur les artistes, les cartouches de l'église mentionnent Pellegrini, un nom que l'on ne retrouve pas dans les documents). Dans l'abside se trouve La Cène, dans la voûte se trouve La Gloire du Paradis. On pense que les plafonds des chapelles adjacentes sont des mêmes artistes, car leur style est très similaire.

Les chapelles latérales furent propriété de nobles vénitiens (Battaglia à droite, Michiel à gauche). D'architecture identique, les voûtes et plafond au-dessus des autels furent peints à fresque par Pellegrini. A noter que le Couronnement de la Vierge, œuvre de Paolo Veronese, placée dans le chœur lors de l'inauguration de l'église en 1586 et comportant plus de 50 personnages, a été déplacé plus tard à l'Accademia.

Adresse : Campo Ognissanti, 1454 Dorsoduro

Horaires : (entrer dans les bâtiments et demander autorisation)

Rev1 06/04/2024

L'église est située sur le rio dei Ognissanti entre San Trovaso et San Sebastiano, un quartier très calme et minéral de Dorsoduro. 

Les religieuses cisterciennes du couvent de Santa Margherita à Torcello quittent leur île devenue insalubre. 

Torcello se dépeuple avec l'essor de Venise et les épidémies (paludisme, peste, etc). Les religieuses créent ici un couvent, qui devient important. 

Une église en bois est élevée à côté du couvent en 1470, dédiée à Marie et Tous les Saints. Mais l'ensemble est reconstruit en dur dès 1505, le couvent est agrandi.

La façade est très développée en hauteur, en trois parties donnant l'illusion de nefs latérales à l'intérieur. 

Le haut campanile est collé à la nef et au couvent. 

L'église est consacrée en 1586 et passe sous obédience bénédictine. En 1806 Napoléon la dépouille et la ferme avec son couvent, elle est laissée à l'abandon jusqu'en 1820. 

Elle devient une maison de retraite puis un hôpital gériatrique jusqu'en 1990, avant de faire partie de l'université Ca'Foscari accueillant des étudiants en séjour. 

L'extérieur est très sobre sans fioritures, ce qui contraste avec l'intérieur (comme souvent à Venise). 

L'intérieur est à une nef avec deux autels de chaque côté. Les 2 piliers soutiennent le barco dédié aux nonnes.  Elle semble beaucoup moins large, et surtout moins haute que l'extérieur. 

En tous cas elle semble très utilisée avec de nombreux offices dans la journée (ce pourquoi il faut aller à la réception à l'intérieur du couvent pour se la faire ouvrir). 

La décoration soignée avec des bouquets de fleurs partout, mais les murs eux-mêmes ne sont pas décorés et plutôt sombres.

(visite par la droite) 

Autel de Saint Antoine de Padoue (ou de l'Annonciation, ou du Crucifix),  de 1738. 

Retable San Antonio con il Bambino Santo (Sandre Piatti, début 18ème), provenant de l'église San Nicolo della Lattuga (détruite). 

Autel de Santa Chiara (ou de la Visitation), refait en 1738 en style baroque. Tous les autels ont remplacé en 1738 les anciens en bois sans doute abîmés par l'humidité. 

Au mur, Santa Chiara sauvée de l'invasion des Infidèles grâce à l'Eucharistie (Gregorio Lazzarini). Au 17ème siècle elle était dédiée à la Vierge et décorée d'une Visitation de Ridolfi. 


La chapelle latérale droite, dite Battaglia. Là aussi, magnifique autel en marbre de style baroque de F. Contin. C'est la tombe de Pietro Antonio Battaglia (condottiere, duc de Candie ??). 

Très belle chapelle, mais on notera les murs relativement décrépis. Noter le croissant de Lune dépassant des nuages aux pieds de la Vierge. 

L'Immaculée Conception (attr. à Gregorio Lazzarini), provient d'un couvent démoli à Castello. 

La voûte complexe est magnifiquement décorée. Les lunettes abritent des putti joufflus au milieu de décors fleuris et la voûte centrale représente l'Assomption de la Vierge (Girolamo Pellegrini). 

A bien regarder, ces fresques sont très abîmées par le temps. 

Le chœur, qui semble étroit par rapport aux chapelles. A gauche au mur, le Jugement de Salomon, et à droite, Visite de Marie à Elisabeth (Gunter Wolf)., 

Autel de tous les Saints (Ognissanti) renouvelé en 1738 comme tous les autres. 

Au centre, "La Santissima Trinità e tutti i Santi", (Moro Veronese, 1570). Effectivement, ils sont presque tous là, évêques, papes, chanoines, Mères supérieures, … 

Certains nous regardent, d'autres ont les yeux au ciel, cette toile est dans tous ses détails impressionnante de vérité 

Gros plan sur le tabernacle typiquement baroque avec ses têtes d'angelots. 

Au-dessus de l'autel, une fresque de la Dernière Cène (Giacomo Grossi et Agostino Letterini). 

Dans la coupole, fresque La Gloire du Paradis avec tous les Saints (Girolamo Pellegrini), ces fresques sont aussi très abimées. A noter les évangélistes dans les pendentifs (aux coins de la voûte). 

Chapelle Michiel à gauche du chœur. L'autel a été commandé par le Noble Michiel pour y avoir sa tombe. A noter la symétrie entre les deux chapelles latérales. 

Dans l'autel entièrement renouvelé en style baroque, L'Archange Saint Michel (Andrea de Michieli), également financé par Michiel. 

Au-dessus de l'autel, Dieu le Père au milieu de Chérubins (Girolamo Pellegrini). 

Au plafond, Le Christ Rédempteur (Girolamo Pellegrini), et les Vertus dans les lunettes.

Vues sur les ailes de la nef depuis le chœur. On distingue le grand barco soutenu par les deux piliers. Le barco était d'accès réservé aux nonnes. 

Les grilles placées devant permettaient aux nonnes d'assister aux offices sans être vues, elles retournaient ensuite dans le couvent par une porte intérieure. 

Côté gauche, autel de Saint François. 

Saint François d'Assise en extase, copie d'un tableau de Guido Reni (auparavant il y avait une toile de Pietro Liberi, le Massacre des Innocents, emportée par Napoléon en 1806). 

Il est bon de rappeler que Napoléon a littéralement vidé un grand nombre d'églises en envahissant Venise. Heureusement, les Autrichiens eurent le bon ton de rapporter tableaux et statues. 

Autel de la fuite en Egypte (ou de la Résurrection). Il appartenait à la famille Da Fonte, leur tombe se trouve sous le pavement devant l'autel. 

Tableau copie d'une œuvre de Pomponio Amalteo (mi 16ème siècle). L'autel est dédié à Saint Joseph. 

Auparavant, on avait une Résurrection de Palma le Jeune, remportée aussi par Napoléon. 

Le plafond est très sobre. 

Seul un motif coloré illustre le caisson central.